CAMEROON
The new locomotive of Western Africa

V.I.P. INTERVIEWS



Interview de:

M. Bello Bouba Maigari,
Ministre du Développement Industriel et Commercial, suivie d’une communication officielle détaillant la politique du MINDIC

Le 4 décembre 2000
Q. 1: Passée 1994 et la dévaluation du Franc CFA, le Cameroun n'a renoué avec la croissance que très récemment. Dans quelle mesure le ministère pour le développement industriel et commercial participe t-il à la relance de l'économie, synonyme de créations d'emplois et de hausse des salaires ?

R. 1: Pour relancer l'économie camerounaise après cette longue période de crise sévère, il a fallu que le gouvernement camerounais, en accord avec ses partenaires bilatéraux comme multilatéraux, s'engage dans la politique d'ajustement structurel pour rétablir les grands équilibres macro-économiques, à commencer par les équilibres budgétaires. Des plans d'ajustement triennaux ont d'ailleurs été mis en place il y a déjà quelques années. Le dernier ajustement réside dans la qualification du Cameroun à l'initiative PPTE (Pays Pauvres Très Endettés) de réduction de la dette. Voilà pour la base. Il était en effet nécessaire de rétablir les grands équilibres pour retrouver la croissance, ce que nous croyons avoir déjà atteint depuis trois ans.

La croissance de l'économie camerounaise a d'abord commencé à se situer aux alentours de 5%. Depuis un an, elle se situe aux environs de 4,5%. Maintenant il nous faut soutenir cette croissance. Et mon département joue un rôle déterminant dans cette voie. Nous sommes le ministère de la production. Il nous faut produire des biens qui soient compétitifs à l'extérieur pour que le pays ait des ressources et que cela soutienne la croissance qui elle-même crée des emplois. Après le ministère des finances qui a encadré l'ajustement structurel, pour ce qui est de retrouver la croissance, nous sommes le deuxième intervenant. Il nous faut relancer la production industrielle et agroalimentaire.

Pour cela, l'Etat s'est engagé depuis quelques années dans la libéralisation. En effet, les premières décennies de notre indépendance ont été marquées par le volontarisme et l'intervention de l'Etat. Cela se justifiait car, lors de l'indépendance, notre pays manquait de capital. Pour créer les infrastructures, un embryon d'industrie, il fallait que l'Etat prenne les devants, qu'il soit initiateur, entrepreneur même. L'Etat a alors créé des entreprises publiques et para-publiques avec comme objectif à terme de se désengager de leur gestion. Mais il a fallu que la crise s'installe pour que l'Etat se décide officiellement à se désengager de tout ce qui concerne les activités de production pour les abandonner au secteur privé. Aujourd'hui, l'Etat se limite à la régulation, la réglementation et la normalisation. Tout cela contribue à créer un environnement des affaires favorable aux investisseurs privés afin que ces derniers se sentent encouragés à venir placer leur argent et à prendre des risques.

La libéralisation donc (suprimir) passe tout d'abord par la privatisation des entreprises publiques et para-publiques, et le démantèlement de tous les organismes de soutien aux prix comme l'Office national de commercialisation des produits de base. Cette grande structure était là pour soutenir les prix des produits comme le cacao ou le café. L'Etat se retire donc maintenant et laisse le secteur privé s'occuper de la gestion aussi bien du café, du cacao comme de la banane, mais aussi le droit de négocier librement les prix des produits tant à l'intérieur du pays qu'à l'exportation.

Au sein du ministère du développement industriel et commercial, nous veillons à la bonne exécution de cette réforme de la législation, dans le sens de la privatisation. Nous nous occupons aussi de tout ce qui peut attirer les investisseurs grâce notamment à une réforme du code des investisseurs. Nous allons en effet remplacer le code des investissements par une charte des investissements (suprimir). Cette charte des investissements que nous élaborons avec le secteur privé, nous la voulons plus libérale pour que l'environnement des affaires soit le plus attractif possible. Ensuite, nous mettrons en place des organismes de promotion qui faciliteront l'accueil des investisseurs. Seront créées une agence de promotion des investissements ainsi qu'une agence de promotion des exportations. Ces deux agences auront pour rôle de faciliter toutes les procédures, grâce à des guichets uniques, des services informatisés, etc. mais aussi l'information des investisseurs.

Nous allons dans le même temps réformer notre zone franche industrielle que nous avons créée au début des années 90 avec l'aide américaine. Cette zone franche a jusque là essentiellement accueilli des entreprises peu performantes du secteur forestier. Nous voulons maintenant qu'elle accueille des industries « industrialisantes » qui rapportent des devises et créent des emplois de qualification. C'est pour cela que nous voulons voir dans cette zone franche des entreprises de pointe qui puissent former de la main d'œuvre qualifiée et transformer véritablement nos matières premières. Depuis un an maintenant, il est interdit d'exporter le bois de nos forêts. Il faut impérativement le transformer, pas seulement en le sciant, mais pour en faire des produits finis destinés à l'exportation. Nous nous soucions de cela également: la qualité des produits générés par notre industrie pour que ceux-ci répondent aux normes internationales. Cette normalisation est un point central de la politique de notre ministère.

Q. 2: Comment voyez-vous le Cameroun réagir face à la mondialisation, et dans la perspective de l'application prochaine des accords de l'OMC ?

R. 2: Le Cameroun doit se préparer à s'insérer dans l'économie globale. Il n'est pas question pour quiconque de se développer aujourd'hui de façon autarcique. Nous devons nous préparer à cette intégration en modernisant tous les secteurs de notre économie, l'agriculture comme l'industrie ou l'artisanat, pour que ces secteurs produisent à partir de normes internationalement acceptées. Ne survivront, ne prospèreront que les économies de niveau international, sinon elles (les autres) ne pourront placer leurs produits. Modernisation veut dire aussi intégration de nouvelles techniques de communication et de production. Cela nécessite beaucoup de travail de législation, que nous avons d'ailleurs entamé en collaboration avec le secteur privé au sein de comités de normalisation. Nous sommes déjà admis par les agences internationales de normalisation qui délivrent des certificats de normalisation - comme l'ISO - auxquels nous nous conformons de plus en plus. De plus, avec un certain nombre de pays africains, nous avons créé une Organisation pour l'Harmonisation du Droit des Affaires (OHADA), qui garantit aux investisseurs une même juridiction dans tous les pays membres. L'OHADA s'occupe aussi des arbitrages à travers une cour arbitrale, ainsi que de combat contre des fléaux tels que la corruption.

Q. 3: Ancien ministre du gouvernement Ahidjo, aujourd'hui membre du gouvernement Biya, vous-êtes aussi leader de l'Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP). Quel recul votre statut d'opposant politique vous donne t-il dans la mise en place de la politique menée par votre ministère ?

R. 3: Je suis bien le leader de l'UNDP, parti qui, pendant les cinq premières années du retour du multipartisme est resté dans l'opposition sans faire de concessions, c'est à dire en refusant d'intégrer le gouvernement. Aujourd'hui, nous faisons partie du gouvernement sur la base d'une plate-forme d'actions gouvernementales négociée entre le parti au pouvoir et le nôtre et qui définit notre programme d'action dans tous les domaines, sociaux ou industriels. Cette plate-forme est la justification de notre participation à l'actuel gouvernement.

Communication de M. Bello Bouba Maigari, Ministre du Développement Industriel et Commercial

Concernant les fondements qui sous–tendent l'action du MINDIC et les principaux axes de la politique mise en place par le Ministre d'Etat.

Tout d'abord, il est nécessaire de rappeler que la grave crise économique et financière qui a secoué le monde des années 80 et ce jusqu'à aujourd'hui, a amené le gouvernement camerounais à revisiter l'ossature de sa politique économique et réorienter ses instruments de promotion du développement.

Nous pouvons citer quelques facteurs qui nous semblent déterminants et qui constituent l'essentiel des fondements qui sous-entendent l'action du MINDIC. Ce sont ces facteurs qui déterminent et orientent la promotion du développement industriel, commercial et artisanal:

La régulation du paysage économique, commercial et industriel du Cameroun. L'Etat est devenu « facilitateur » par l'établissement d'un régime juridique et institutionnel incitatif et la mise en place des structures et infrastructures d'encadrement et d'animation du milieu économique. L'Etat doit s'assurer non seulement des potentialités du secteur privé mais faciliter le bon fonctionnement de celui-ci en mettant à sa disposition une gamme de services, en terme d'information et de formation. Le secteur privé doit être sensibilisé et organisé et faire preuve de capacité (pour reprendre l'expression anglosaxone « capacity ») pour reprendre en main ses activités, jadis contrôlés par l'Etat, en s'organisant en coopérations professionnelles.

En deuxième lieu, je pourrais vous parler de la promotion économique et commerciale du Cameroun, grâce à un meilleur arrivage du pays à la mondialisation. Ceci, à travers l'institution d'un comité technique national de suivi des accords de marrakech. Vous le savez bien, avec la mondialisation de l'économie et la globalisation des échanges, le gouvernement s'est engagé dans une politique de libéralisation et de désengagement de l'Etat des secteurs de production, de distribution et de commercialisation des biens et des services.

Le troisième facteur concerne notre engagement à œuvrer dans l'augmentation du volume des échanges commerciaux du Cameroun grâce à la conquête des marchés étrangers. Mon département a en charge le déploiement de la nouvelle diplomatie qui est un concept essentiellement économique. Ces échanges commerciaux se consolident et se diversifient, grâce à la coopération économique tous azimuts que nous impulsons, aux missions économiques, à la participation aux foires internationales et surtout à l'intensification du partenariat d'affaires.

Enfin, nous parlerons de la consolidation du processus de libéralisation des activités économiques et commerciales du pays, enclenché par l'abandon de la politique dirigiste de l'Etat faite de restrictions touchant par exemple la délivrance des licences agréments. La crise économique a sonné le glas de l'Etat- providence.
Voilà pourquoi, le processus de désengagement de l'Etat a eu comme traduction, la promotion du libre échange et le rapprochement de l'Etat des milieux d'affaires, avec l'institution d'un cadre de dialogue paritaire secteur public/secteur privé, appelé comité interministériel élargi au secteur privé.

Aperçu des objectifs du ministère en terme de politique sectorielle s'agissant du développement industriel et commercial.

Pour réaliser les missions statuaires du ministère du développement industriel et commercial, nous nous sommes engagés dans une réflexion d'élaboration des politiques sectorielles avec une perspective tridimensionnelle de promotion des activités commerciales, industrielles ainsi que des PME, de l'artisanat et du secteur informel. Nous avons ainsi les stratégies suivantes: la stratégie de promotion commerciale, la stratégie sectorielle des PME et la stratégie sectorielle de promotion industrielle. Cette dernière repose sur trois options fondamentales: la libéralisation de l'activité commerciale, la promotion des exportations (biens et services) ainsi que l'intensification de la coopération commerciale.
La libéralisation de l'activité commerciale.

Le processus de libéralisation des activités commerciales étant très avancé (simplification des procédures à l'importation et à l'exportation), les actions à entreprendre ou à renforcer se situent dans le cadre des mesures d'accompagnement pour éviter toute dérive.

C'est ainsi que l'accent sera mis sur la protection du consommateur(contrôle de qualité, et service après-vente) et le respect des formalités administratives relatives à l'accès à la profession de commerçant.

La Promotion des exportations


On peut citer quelques actions:
· La recherche des nouveaux débouchés.
· La promotion des produits à forte valeur ajoutée au détriment des produits traditionnels.
· La suppression des taxes sur certains produits à l'exportation.
· L'intensification de la coopération commerciale.

Il s'agit pour le Cameroun de se mettre en conformité avec les règles fixées par les organisations telles que l'OMC, la CNUCED, la CEMAC, afin d'en tirer le meilleur avantage.

La stratégie sectorielle des PME: secteur artisanal- secteur informel. Pour l'exercice 2000- 2001, les objectifs globaux ci-après seront retenus:

Secteur des PME


· La poursuite des travaux relatifs à la définition d'une politique de promotion et de développement de la PME.
· Le développement et le renforcement des capacités opérationnelles des PME.
· La poursuite de l'organisation des PME en groupements interprofessionnels et en corps de métiers.
· La mise en place d'un mécanisme de coordination des différentes interventions visant la promotion des PME.
· La recherche de nouveaux mécanismes de financement des actions des PME.
· L'extension des activités de financement des TPE en dehors des zones urbaines de Douala et de Yaoundé.

Les actions et études programmées sous-tendent prioritairement la réalisation de ces objectifs. Elles permettent à chaque secteur d'atteindre les résultats suivants: la relance et la consolidation de l'économie nationale par la valorisation des richesses locales, le développement du marché local et l'accroissement des exportations ainsi que le gain de la lutte contre la pauvreté par la création des emplois et des richesses.

Stratégie sectorielle de promotion industrielle

Les objectifs poursuivis peuvent se résumer ainsi:

· La relance des investissements productifs par l'offre d'un cadre plus incitatif.
· L'amélioration de la productivité, de la compétitivité et des exportations des produits manufacturés.
· L'accroissement de l'apport de l'industrie dans la formation du produit intérieur brut (PIB).
· La valorisation des richesses locales et l'accroissement de la transformation des matières premières locales.
· L'adaptation du tissu industriel au contexte de la mondialisation.
· La protection de l'industrie locale et des consommateurs camerounais par l'application des normes.

Les branches commerciales et industrielles les plus performantes.

Le contexte économique actuel est marqué par une légère reprise qui se traduit par un taux de croissance de 5% environ. Toutefois, cette croissance est en grande partie adossée sur les secteurs primaire et tertiaire qui représentent environ 80% du PIB. Le secteur secondaire vecteur du développement durable ne représente que 15% environ, hors recettes pétrolières.

Les branches commerciales les plus performantes sont:

· Les huiles brutes de pétroles 343 milliards de CFA.
· La banane douce 31,2% des recettes de 1999/2000.
· Les produits industriels (beurre de cacao, feuilles de placage, huile de palme) pour 30,4% des recettes 1999/2000.
· L'aluminium brut pour 28,9% des recettes 1999/2000.
· Les bois sciés pour16,6% (1999/2000), avec une évolution de plus de 23,2%.

Les branches industrielles ayant une croissance économique significative sont celles du ciment et de la métallurgie. En effet, dans ce secteur de l'industrie lourde, les clignotants sont au vert sur tous les plans. De décembre 1999 au 31 mars 2000, son chiffre d'affaire T.T.C a connu taux de croissance 1,01%. Les salaires et les effectifs se sont accrus respectivement de 1,11% et de 2,21%.

Les initiatives mises en place pour attirer les investisseurs privés nationaux et étrangers.
Les initiatives mises en place concernent essentiellement l'amélioration du cadre juridique et institutionnel des affaires et passent par:

· La réforme du cadre incitatif des investissements notamment par la mise en place des codes sectoriels.
· Mise en place d'un code pétrolier (déjà effectif).
· Un code minier en cours d'examen à l'assemblée nationale.
· Un code gazier et un code touristique en cours d'élaboration, de même qu'une charte des investissements qui apparaîtra le moment venu comme une véritable constitution économique du Cameroun.
· Un audit des Zones Franches ordonné récemment par le gouvernement.
· Une réflexion en vue de transformer la cellule de gestion du code des investissements et des exportations.
· L'ouverture d'un guichet unique au sein du Port autonome de Douala.
· L'assainissement du système bancaire et une modernisation de la fiscalité.

Politique des zones franches mise en place: Résultats obtenus et objectifs à moyen et long terme.

L'ordonnance n°90/001 du 29 janvier 1990 a créé dans notre pays le régime de la zone franche. Ce régime a pour but de promouvoir de nouveaux investissements, de faciliter le développement des exportations et de créer de nouveaux emplois au Cameroun. Une entreprise peut bénéficier soit du statut de zone franche industrielle soit du statut de Point Franc Industriel.

Parmi les avantages auxquels peut prétendre l'entreprise bénéficiant du statut de Point Franc Industriel, on peut citer les plus importants: Les avantages financiers et les avantages douaniers.

Avantages financiers

L'entreprise bénéficiant du statut de point franc industriel est exonéré totalement des impôts et taxes directs et indirects, droits d'enregistrement. A partir de la 11ème année, elle est soumise au paiement de 15% de l'impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux.

En outre, les déficits subis au cours de la période d'exonération sont considérés comme charges des exercices suivants.
Elle n'est pas obligée de réinvestir la réserve spéciale de réévaluation.

Avantages douaniers

Cette entreprise est exonérée de tous droits et taxes de douane actuels et futur. Elle est exonérée de toutes importations (bien d'équipement, mobilier de bureau, matériel de bureau, matériaux de construction, outils, pièces détachées, matières premières, produits intermédiaires, fournitures, bien de consommation).
Elle n'est pas soumise au paiement de la taxe de 0,95% de la valeur FOB des marchandises
(taxe d'inscription et de vérification).

L'objectif visé à moyen et à long terme est d'attirer de nombreux investisseurs par les avantages qu'offre ce régime de manière à créer un tissu industriel apte à accroître notre potentiel à l'exportation.

La diversification des exportations pourra mettre notre pays à l'abri des fluctuations en baisse de nos exportations traditionnelles.



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You can find the version published in Forbes Global or Far Eastern Economic Review

© World INvestment NEws, 2001. This is the electronic edition of the special country report on Cameroon published in Forbes Global Magazine, October 1st, 2001. Developed by Agencia E.