Guinea, Republic of: Interview with Mr Doussou Lanciné Traoré

Mr Doussou Lanciné Traoré

Recteur (Université Gamal Abdel Nasser de Conakry)

2016-11-04
Mr Doussou Lanciné Traoré

Créé en 1962, l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry est la plus grande et la plus ancienne Université de la République de Guinée. Pouvez-vous nous en dire plus sur l’histoire de votre Université jusqu’à présent ?

 


L’Université de Conakry a été fondée en 1962 sous l’appellation Institut Polytechnique de Conakry. Cela se fut en faveur du 4ème anniversaire de l’accession de notre pays à l’indépendance où le gouvernement a mis en place cette Université pour répondre aux besoins de cadres qui se posait à l’époque. A sa création en 1962 nous rencontrions les facultés directement liées à l’économie, d’où son nom d’Institut Polytechnique. A la longue avec l’accroissement de la population estudiantine, les infrastructures ne répondaient plus. D’autres institutions ont alors été créées comme l’Université de Sonfonia pour répondre à la demande croissante étudiante.


A sa création, l’essentiel pédagogique était basé sur les référentiels soviétiques car cette Université a été construite par l’ancienne Union Soviétique. Avec l’avènement de la 2ème République, un régime libéral s’est constitué et deux référentiels se sont interposés : le référentiel soviétique et celui français. En 2006, nous avons donc opté pour le système LMD (Licence Master Doctorat) qui est beaucoup plus universel pour avoir la possibilité de s’ouvrir à d’autres universités et qu’il y ait la possibilité d’échanges étudiants et d’enseignants chercheurs. En matière de capacité aujourd’hui, l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry comprend deux facultés, la faculté de Médecine Pharmacie Odontostomatologie (MPOS) -où il y a des départements de médecine, de pharmacie et d’odontostomatologie-, et il y a la faculté des sciences où il y a le département de Biologie, de mathématiques, Physique et Chimie. Par ailleurs, il y a l’Institut Polytechnique qui a gardé son nom où les ingénieurs sont formés. A ce niveau il y a au moins sept départements, à savoir les départements de Génie civil, Génie chimique, Génie électrique, Génie mécanique, Génie industriel, la Télécommunication et l’Informatique. Enfin, il y a deux centres, un d’informatique et un consacré à l’étude et à la Recherche de l’Environnement.


Au cours de l’année universitaire 2015 – 2016, l’Université accueillait à peu près 10,000 étudiants, tout profil confondu. Dans nos promotions nous avons également des étudiants en formation payante, avec les échanges universitaires, parce que notre université a au moins des représentants dans plus de 12 pays africains. Nous avons des universités partenaires en Afrique, en Europe et en Amérique.

 

 

Votre université a formé une multitude de cadres supérieurs faisant aujourd’hui partis des leaders de l’économie Guinéenne. Selon vous, à quel point l’économie Guinéenne est-elle redevable de votre Université et niveau de formation ?

 


L’un des mérites de l’Université de Conakry est d’avoir formé à nos jours plus de 5000 cadres, non seulement pour le pays mais aussi pour la sous-région. Actuellement il n’y a pas un seul secteur administratif ou productif où vous ne rencontrez pas quelqu’un qui a fait sa formation à l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry. C’est notre contribution au développement de la nation.

 

 

A quel point l’éducation est-elle un déterminant de l’économie Guinéenne ?

 


Si nous prenons les missions d’une université, il y a essentiellement trois missions: la formation, la recherche et les services à la communauté. L’Université doit avoir pour vocation de résoudre les problèmes qui se posent à la société, à travers les résultats de recherches des enseignants chercheurs. On ne peut parler de développement sans ressources humaines et ce sont les universités qui forment ces ressources humaines.

 

 

Alors que le Professeur Alpha Condé a fait des jeunes la priorité de son second mandat afin de relancer l’économie, la formation qui leur est adressés est cruciale. Quelles sont vos ambitions pour assurer une formation à la hauteur des attentes du Pr Alpha Condé?

 


Avec l’aide du gouvernement qui a mis en place une politique de rénovation et d’extension de l’Université, notre ambition est de faire revenir les facultés qui étaient ici par le passé et qui ont été délocalisées par manque d’infrastructure. Une fois que nous aurons suffisamment d’infrastructure, nous recréerons graduellement ces mêmes facultés pour qu’elles répondent effectivement au nom d’Université. La seconde ambition essentielle est de faire une adéquation entre nos programmes de formation et les besoins d’emploi dans le pays. Rien ne sert de former des cadres qui ne trouvent pas d’emploi par la suite. Ce point est notre priorité actuelle pour répondre au besoin du pays qui fait face à un chômage important et qui nécessite des cadres formés pour le secteur privé. Cela passe nécessairement par des formations beaucoup plus pratiques, ce qui nous demande de palier le problème d’équipement et le problème de laboratoire. Ayant plus de 50 ans, cette université a maintenant des équipements vétustes et nous avons un grand besoin de rénovation, autant pour nos laboratoires que nos équipements en général.


L’Etat a d’ailleurs en vue la rénovation de nos laboratoires et la construction d’un laboratoire de recherche. Mais nous nécessitons des investisseurs privés pour nous aider à faire face à nos besoins actuels en matière d’équipement.

 

 

Une nécessité pour les universités est de compter sur des partenaires stables, tant d’un point de vu local qu’international. Comment véhiculez-vous l’image positive de votre Université à l’international afin de nouer un maximum de partenariats ?

 


Nous avons plusieurs méthodes et avons créé en 2010 un site faisant connaître notre université. Sur ce site nous avons répertorié l’ensemble des informations sur notre université et cela nous permet de faire connaître notre université en dehors de la Guinée. Ensuite nous avons la participation de nos enseignants chercheurs aux différentes rencontres en Guinée et en dehors ainsi que les échanges d’étudiants. Nous avons une coopération avec l’Université de Lille qui envoie des étudiants français en stage dans notre université, et en échange nos étudiants vont en France pour des stages. Cela contribue non seulement à faire connaître notre université mais aussi à partager les savoir-faire entre nos deux nations. Nous organisons également régulièrement des conférences avec de hautes personnalités sur des problématiques contemporaines.

 

 

La Guinée accueillera la Capitale Mondiale du Livre à partir d’Avril 2017 et ce pour une durée de un an ce qui représentera un événement majeur pour la Guinée et le secteur culturel. Quand on connait votre implication dans la culture, comment préparez-vous votre établissement à accueillir cet événement ?

 


Depuis le choix de la ville de Conakry comme Capitale Mondiale du Livre en 2017, certaines activités ont été effectuées sur notre campus en collaboration avec les organisateurs de cet évènement, l’Harmattan Guinée. Nous avons fait des conférences à l’Université de Conakry pour attirer l’attention des étudiants et des encadreurs sur cet évènement historique qui est une première dans notre pays et qui doit nécessairement profiter à l’université en tant que sanctuaire de formation. Nous comptons vivement contribuer à cet évènement et certaines rencontres et échanges auront lieu à l’université dans notre salle des fêtes. Par ailleurs, nos enseignants chercheurs et étudiants contribueront largement à la réussite de cet évènement à travers leur engagement.

 

 

Avant d’être nommé recteur de l’UGANC, vous avez obtenu un doctorat en Génie Civil et une riche expérience au sein de cette université à de nombreux postes. Quelles seraient vos recommandations à l’égard de vos étudiants pour achever une telle carrière ? Vos principales fiertés ?

 


J’ai fait mes études universitaires et postuniversitaires à l’Union Soviétique, à Moscou, où j’ai étudié le Génie Civil. A l’époque, l’Union Soviétique octroyait beaucoup de bourses à la Guinée et nombreux sont ceux à avoir été formé là-bas. En effet, à la création de l’université en 1962, nous n’avions pas tellement de cadres pour assurer la formation des étudiants, et ce sont des experts Russes qui étaient venus pour assurer cette formation. A ce jour encore, nous avons toujours des experts Russes qui viennent partager leur savoir-faire dans notre Université. C’est aussi pourquoi, à l’époque, notre référentiel pédagogique était basé sur le référentiel soviétique car 60% des enseignants étaient d’origine Soviétique et lors de notre indépendance en 1958, l’Union Soviétique fut l’un des premiers à accompagner la Guinée.


Après ma formation postuniversitaire, je suis rentré pour venir servir à l’Université de Conakry. J’ai été chef de département de Génie civil et suis ensuite venu à l’Institut Polytechnique où j’ai été nommé Recteur de l’Université de Conakry. J’ai appartenu à beaucoup de commissions de restructuration de l’université de 1990 à nos jours. C’est le milieu qui m’a vu naître, et c’est dans ce même milieu que j’évolue depuis mon retour de Russie après mes études.


Ma recommandation principale à l’égard de mes étudiants est de les inviter au travail car seulement le travail paie. Si mes étudiants assimilent parfaitement les cours donnés qui leur sont donnés, ils pourront s’en servir pour trouver du travail une fois leur diplôme obtenu, et ainsi contribuer au développement de l’économie. D’ailleurs notre université a formé plus de 5000 cadres qui sont dans les différentes sphères de développement de la nation guinéenne, et à l’étranger. L’appel, c’est le travail d’abord, puis le patriotisme. Quand on vous forme il faut bien rendre la monnaie de sa pièce à votre nation. Il ne faut pas seulement aller à l’étranger pour se former et y rester, il faut revenir servir son pays. C’est un appel que je leur lance. Le personnel administratif et les enseignants chercheurs de l’université de Conakry se trouvent à leur disposition pour les accompagner, pour les rassurer qu’un avenir radieux les attend en Guinée.

 

 

Les lecteurs de l’eBiz Guides incluent majorité d’hommes d’affaire et politiciens des plus influents du monde entier. Quel message final voulez-vous leur transmettre sur les raisons d’investir en Guinée ainsi que sur votre Université ?

 


D’abord je souhaite vous remercier d’avoir eu l’initiative de faire connaître notre pays à l’international et de représenter notre Université à la hauteur de son positionnement dans ce guide. Cela permettra aux investisseurs qui ne connaissent pas notre Université de la découvrir et de s’intéresser à notre Université pour venir nous accompagner. C’est une occasion pour que ces investisseurs connaissent les besoins de notre université et voient dans quelle mesure ils peuvent s’impliquer dans la résolution de nos défis pour que nous en profitions tous pour le développement de la Guinée.