CÔTE D´IVOIRE / IVORY COAST
Reshaping the nation














Pape S.Thiam, General Director



"A direct link between you and Africa"

Interview

Mr. Pape S.Thiam,
Directeur Général

6 septembre 1999
Pouvez-vous nous donner un aperçu historique de la compagnie Air Afrique ?

Air Afrique est une compagnie multinationale créée le 28 mars 1961 à Yaoundé au Cameroun par 11 états africains qui avaient compris qu'aucun d'eux ne pouvait s'offrir tout seul une société de transport aérien viable.

C'est donc la solidarité qui est le fondement de notre compagnie dont l'objectif principal est de favoriser l'intégration économique, sociale et culturelle de ces pays. Aujourd'hui, elle regroupe comme à l'origine 11 Etats membres: Bénin, Burkina-Faso, Centrafrique, Congo, Côte d'Ivoire, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad et Togo.

La compagnie a-t-elle connu des mutations de sa création à ce jour ?

En 1968, le Togo s'est joint aux premiers Etats fondateurs de la compagnie portant ainsi leur nombre à 12. En 1971, le Cameroun quitte Air Afrique, et en 1977, le Gabon se retire, les Etats membres se retrouvent donc à dix jusqu'à l'entrée du Mali en 1992, où ils retrouvent le nombre mythique de onze. Côté flotte, Air Afrique a commencé par la location d'avions à une compagnie française de l'époque, UAT qui exploitait dans la région. Aujourd'hui, Air Afrique est une compagnie d'économie mixte puisqu'elle appartient à une grande majorité de 68,44% aux 11 Etats membres, avec, toutefois des parts d'actionnaires privés dont Air France 11,84%, l'Agence Française de Développement (8,872%), DHL 3,11%, la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD) 4,44% et une société ivoirienne dénommée Abidjan Catering, filiale du groupe Accor 3,30%.

Que représente Air Afrique au plan de l'effectif et des structures ?

Air Afrique, aujourd'hui, c'est 4500 personnes de 30 nationalités différentes, environ 450 liaisons par semaine, l'exploitation sur quatre continents, la desserte d'une trentaine de pays. Air Afrique transporte un peu plus d'un million de passager par an, environ soixante mille tonnes de frêt. La compagnie dispose d'une filiale charter, d'une filiale tour opérator. Une filiale industrielle est en création.

Comment Air Afrique arrive-t-elle à concilier sa mission de service public et sa vocation de rentabilité ?

Air Afrique est un outil important pour nos Etats membres. Elle permet, d'abord de relier ces Etats entre eux, ensuite de les relier au monde extérieur sur des lignes qui ne sont pas toujours rentables.

Comment se traduit l'impact d'Air Afrique dans l'économie des Etats membres ?

est un vecteur du transfert des technologies du Nord vers le Sud puisque nous avons aujourd'hui trois centres industriels établis à Abidjan, à Dakar et à Brazzaville. Ces centres utilisent les technologies les plus modernes en terme de maintenance et d'équipements d'avions avec un personnel à 98% africain. Le siège de la compagnie dispose d'un service informatique qui fait des développements de programmes dans les outils les plus modernes. L'impact d'Air Afrique dans l'économie des Etats membres est important. Celui-ci se traduit par une valeur ajoutée financière qui est apportée par des ventes effectuées dans des zones hors CFA pour des consommations en zone CFA. Si au niveau continent, Air Afrique a la dimension d'une grande compagnie, au plan international et mondial, c'est une compagnie de dimension moyenne. Par le canal de sa filiale charter, air Afrique est un instrument de développement touristique. Nous considérons que nous sommes le porte drapeau de l'Afrique noire à l'extérieur. Même les Africains dont les pays ne font pas partie d'Air Afrique éprouvent une certaine fierté en voyant cette antilope cheval dans les aéroports des pays d'Europe ou d'Amérique. Il faut savoir qu'Air Afrique est le seul organisme communautaire qui fonctionne.

Pouvez-vous nous donner le chiffre d'affaires d'Air Afrique de l'année dernière ?

Je ne suis pas autorisé à vous donner le résultats de l'année dernière, ils ne sont pas encore approuvés par le Conseil d'Administration, mais le chiffre d'affaires d'Air Afrique est de 270 milliards de FCFA.

Pouvez-vous nous mentionner les principales lignes de conduite de votre plan d'action pour résoudre le problème de la dette ?

La dette en question a été contractée pour l'essentiel au début des années 90, à l'occasion de l'achat des Airbus A 310 pour renouveler notre flotte, cette dette a été aggravée par la dévaluation du FCFA en janvier 1994 qui a doublé mécaniquement l'encours et le service de la dette dans le budget d'Air Afrique parce qu'elle a été contractée dans un panier de monnaies qui était constitué des monnaies les plus fortes du monde. Cette dette est en cours de traitement avec nos créanciers et les assureurs européens, nous espérons arriver à des solutions consensuelles.

Pour évoquer également une autre priorité de votre mandat, on va parler de la privatisation. Avez-vous déjà un plan établi ?

Les Etats membres détenaient 70% des actions de la compagnie, cette part est descendue récemment à 68,44% du fait de la capitalisation d'une créance de nos filiales sur notre compagnie. Les Etats ont décidé de ne garder que 33,34% et de céder tout le reste à des privés. Le dossier de la privatisation est cours de préparation avec une banque d'affaires européenne et un cabinet d'experts américains, nous devrions pouvoir mettre sur le marché les actions d'Air Afrique au courant de l'an 2000.

Air France est-elle l'un des premiers partenaires privés ? Pourrait-il y avoir une augmentation de ses parts dans Air Afrique ? Sur quel plan voyez-vous ce partenariat ?

Il est certain qu'en cas de privatisation, les actionnaires privés présents dans le tour de table actuel dont Air France fait partie à hauteur de 11,84% ont des droits de péremption. Pour le moment, Air France n'est pas prononcée mais elle n'est pas exclue pour autant.
Cela n'ira-t-il pas vers une mainmise totale d'Air France sur Air Afrique ? Ne croyez-vous pas que Air Afrique soit une compagnie multiculturelle qui dessert 4 continents et aussi l'intérêt d'attirer d'autres partenaires (les américains, les asiatiques etc.) ?

Dans la privatisation, il est question d'avoir un partenaire stratégique qui pourrait être Air France ou une autre compagnie. La privatisation sera ouverte à tout le monde. A cet effet, nous serions particulièrement heureux que des investisseurs d'Outre Atlantique, s'intéressent à Air Afrique, compagnie multiculturelle et multinationale. Il n'est absolument pas aberrant de penser que les actionnaires venant d'Asie, d'Amérique, d'Europe et surtout d'Afrique s'intéressent à cette compagnie.

Quand je parle des Etats Unis, je pense à la libéralisation de l'espace aérien ivoirien avec le développement de l'aéroport Houphouet Boigny. Quelle sera la conséquence du développement de l'aéroport ainsi que le nouveau rôle d'Air Afrique ?

Le développement de l'aéroport d'Abidjan concerne deux entités ; l'organisme qui gère cet aéroport: l'AERIA pour les infrastructures aéroportuaires et l'Etat ivoirien. Nous avons entrepris depuis plusieurs années son développement commercial en créant un véritable hub, à Abidjan à améliorer son fonctionnement. Nous espérons que l'aéroport d'Abidjan soit qualifié catégorie 1 pour que nous puissions faire des vols directs au départ d'Abidjan vers les Etats-Unis.

Quels sont les avantages compétitifs d'Air Afrique quand vous devez la comparer à ses principaux concurrents ?

Le premier avantage que nous avons, c'est notre portefeuille de droits aérien. Nous gérons les portefeuilles de 11 Etats, ce qui multiplie nos possibilités par 11, vis à vis de chaque Etat tiers. C'est un avantage considérable par rapport à la concurrence africaine qui ne gère que le portefeuille d'un Etat, ce qui la désavantage par rapport à nous. Nous avons aussi le réseau le plus dense en Afrique de l'Ouest et Centrale, nous avons tissé une véritable toile d'araignée sur l'Afrique pour permettre des connexions entre les villes africaines. Air Afrique est une compagnie qui a en son sein beaucoup de compétences et de professionnalisme, la preuve en est que ses actionnaires ont chois, pour la première fois de son histoire un cadre de la maison pour diriger cette compagnie, c'est un hommage qui est rendu à la compétence du professionnalisme, du personnel. Le fait qu'Air Afrique a traversé des crises successives dont certaines ont été sur le plan social assez aiguës, en 1996 notamment, a légèrement altéré notre culture d'excellence, il convient de la restaurer et de rétablir le sens de l'hospitalité africaine légendaire dans nos avions, nos escales et dans nos agences. Nous avons mis en place un programme de formation ambitieux dans le domaine relationnel, commercial, technique, pour arriver à restaurer cette excellence qui est à notre portée. Notre avantage est double: être des professionnels comme les occidentaux et rester africains dans notre façon de recevoir et de nous comporter vis à vis de la clientèle. Si nous arrivons à combiner ces deux impératifs, nous aurons atteint cette culture de l'excellence dont nous ne sommes pas loin. L'élément ressource humaine est un élément clé du plan de redressement que j'ai mis en place, tout est axé sur le personnel, sa formation, sa valorisation etc. Bien entendu, dans le plan, il y a la réduction des coûts, la reconquête des parts de marché perdues et la conquête de nouveaux marchés, mais tout cela tourne autour de l'homme qui est pour moi un atout essentiel.

Quels sont les avantages compétitifs d'air Afrique quand vous devez la comparer à ses principaux concurrents ?

D'abord dans le tour de table d'Air Afrique lors de la privatisation. Je rappelle que cette privatisation se fera non pas par cession de parts des Etats vers les privés mais, par une augmentation de capital qui ne sera pas suivie par les Etats. Dans ce domaine, nous sommes très intéressés par l'apport des capitaux extérieurs. Nous sommes également intéressés par une coopération dans le domaine du développement technologique, nous allons filialiser notre activité maintenance qui est implantée dans trois grandes villes: Abidjan, Brazzaville et Dakar. Nous souhaitons partager cette activité, une fois filialiser, avec des partenaires stratégiques pour la développer et en faire le premier pôle de maintenance d'Afrique. Nous avons une filiale charter et nous sommes à la recherche de partenaires pour son développement. Nous sommes prêts à leur céder une partie des actions puisqu'il y a un potentiel touristique énorme dans la région dont le développement de trafic est supérieur à la moyenne mondiale. Le tourisme est une source de devises qui n'est pas négligeable et les gouvernements africains sont de plus en plus conscients qu'il y a beaucoup à en tirer.

Pouvez-vous nous donner un aperçu de votre parcours professionnel et comment voyez-vous votre compagnie dans 5 ans ?

Je suis ingénieur de formation et quand j'ai terminé mes études, j'ai travaille quelque temps pour la société Elf comme ingénieur, je suis rentré à Air Afrique il y a 32 ans. J'y ai gravi tous les échelons de la hiérarchie technique, jusqu'au poste de Directeur chargé des Moyens Techniques. En 1989, j'ai réorienté ma carrière vers le commercial, j'ai commencé un peu plus bas dans la hiérarchie. J'ai été nommé Directeur Air Afrique pour le Congo, Directeur pur la France, Directeur pour l'Europe et ensuite, j'ai occupé le poste de Directeur commercial jusqu'en avril 1999, date à laquelle j'ai été porté à la tête de la compagnie comme Directeur général. Je suis un pur produit de la maison, mon passage à Elf n'est qu'une petite parenthèse dans ma carrière. Dans 5 ans, notre compagnie sera développée et aura derrière elle, la longue période de crise qu'elle a connue, elle rassemblera le plus d'Etats africains possible, ce qui n'est pas incompatible avec la privatisation et occupera la place qui lui est due dans le monde du transport aérien international.

Quel est le message final que vous souhaitez adresser à nos 4,5 millions de lecteurs américains ?

Fly Air Afrique !

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© World INvestment NEws, 2000.
This is the electronic edition of the special country report on Côte d'Ivoire published in Forbes Global Magazine.
August 21th 2000 Issue.
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