Congo: Interview with M. Rodolphe Adada

M. Rodolphe Adada

Minister (Ministère du Développement Industriel et de la Promotion du Secteur Privé)

2011-03-02
M. Rodolphe Adada
Le ministère du Développement Industriel et de la Promotion du Secteur Privé possède la double responsabilité de dynamiser le secteur industriel et de le rendre attractif aux investissements locaux et étrangers. Il joue le rôle d’intermédiaire entre le Gouvernement et les acteurs privés, afin de conduire les politiques industrielles nécessaires à l’orientation de l’économie vers une diversification des sources de revenus du PIB. Cette organe est appelé à conduire les projets d’un Etat facilitateur et promoteur de l’investissement, dans une stratégie de développement d’un tissu industriel structuré, durable et solide.

« Il nous faudra donc à l’avenir obtenir une plus grande diversification de l’économie, en allant vers une industrie manufacturière et de substitution des importations, [grâce au] développement « d’industries structurantes », c’est-à-dire des industries qui sont capables de déclencher l’émergence d’autres industries en amont ou en aval. […] L’Etat doit jouer le rôle de promoteur, de facilitateur, de catalyseur de l’investissement. […] Le développement n’est pas une affaire de charité, mais une bonne compréhension des intérêts des deux parties ». M. le ministre d’Etat Rolophe ADADA, ministre du Développement Industriel et de la Promotion du Secteur Privé



Le ministère du Développement Industriel et de la Promotion du Secteur Privé est l’organe de conception et d’exécution des politiques du Gouvernement en matière de développement de l’industrie et de soutien des acteurs privés. A quelles missions le ministère du Développement Industriel et de la Promotion du Secteur Privé s’attèle-t-il au quotidien ?

La promotion du secteur privé consiste à concevoir les stratégies du développement industriel, à suivre le climat des affaires pour jouer le rôle d’intermédiaire entre le Gouvernement et les entreprises, et soutenir l’investissement au Congo. Quant à la stratégie industrielle, « le Président a fortement idée à placer ce septennat sur le signe de l’industrialisation du Congo ». Le secteur primaire –pétrolier et minier- concentre l’essentiel des industries, « il nous faudra donc à l’avenir obtenir une plus grande diversification de l’économie, en allant vers une industrie manufacturière et de substitution des importations ». Trois objectifs ont été donnés : le développement de l’agro-industrie, pour participer à l’amélioration de la sécurité alimentaire ; la promotion du secteur de la construction et des grands travaux ; et le soutien aux initiatives du secteur privé, afin de favoriser la  création d’emplois notamment.



L’établissement d’un tissu industriel solide et l’incitation à l’initiative privée est un moteur au développement économique d’un pays. Cependant, certains freins structurels ou humains font que la République du Congo disposent plus d’unités artisanales que d’un réel maillage d’activités industrielles. Quelles orientations le ministère a-t-il décidé de suivre afin d’initier et promouvoir cette dynamique d’industrialisation ?


Le mouvement d’industrialisation va se faire par « le développement « d’industries structurantes », c’est-à-dire des industries qui sont capables de déclencher l’émergence d’autres industries en amont ou en aval », soit sous forme de sous-traitance, d’approvisionnement ou d’écoulement des marchandises par exemple. Les industries du palmier à l’huile, du maïs ou du manioc tiendront notamment un rôle d’importance dans cette stratégie.

Nous avons conduit des forums départementaux pour établir dans chaque région un mappage des atouts particuliers à chacune d’elles, afin de définir les stratégies locales de développement et de veiller à conserver une certaine cohérence globale.



Une volonté politique de diversification de l’économie a été formulée par le Président de la République M. SASSOU NGUESSO, visant à accroitre la contribution relative de l’industrie hors pétrole dans le PIB. A considérer les efforts entrepris, comment pourrait-on imaginer le paysage industriel du Congo d’ici les prochaines ? Quelles stratégies et quels moyens seront déployés à cette occasion ?   

Nous aspirons à conserver ce maillage d’industries moyennes ou petites, sans pour autant écarter l’existence d’industries majeures dans des secteurs particuliers, comme l’extraction minière ou le pétrole évidemment, pour soutenir un plein emploi d’une jeunesse bien formé. Notre vision doit prendre cette direction. La position de Congo est aussi un atout considérable pour ce pays.

Le rôle de l’Etat a certes changé, il n’est plus l’investisseur principal dans l’économie, mais « il doit jouer le rôle de promoteur, de facilitateur, de catalyseur de l’investissement, à travers d’aides au financement ou de bonifications aux emprunts par exemple ». La sortie de la République du Congo du cercle vicieux de la dette s’est poursuivie en 2010, on peut aisément concevoir que le soutien aux entreprises privées connaisse un nouvel élan avec les moyens libérés. L’Etat peut cependant aussi décider de porter une activité qu’il considère comme importante, en impulsant le développement par un investissement initial pour rendre le secteur attractif par la suite. La stratégie étatique est bien celle d’incitation à l’investissement plutôt que de créateur de l’industrie.



Quelle place cette stratégie fait-elle aux investisseurs étrangers ?

Dans un pays comme la République du Congo, les investisseurs qu’il y a à convaincre sont à l’étranger. Dans le contexte de mondialisation actuel, nous ne pouvons pas vivre en autarcie. L’attrait des capitaux étrangers passe par un code d’investissement favorable, une stabilité monétaire, une volonté à l’amélioration du climat des affaires à travers une sécurité judiciaire et juridique par exemple. Les investisseurs étrangers sont évidemment les bienvenus et notre participation à votre projet est aussi un appel à leur arrivée.

Suite à la tenue des différents forums départementaux, nous comptons aussi organiser cette année un forum sur le développement industriel à Brazzaville, afin d’exposer notre stratégie, nos atouts et convaincre les investisseurs à venir en République du Congo. « Le développement n’est pas une affaire de charité, mais une bonne compréhension des intérêts des deux parties ». L’effort de prendre le chemin de la diversification de l’économie se fait en collaboration avec nos partenaires internationaux et multilatéraux, tels que la Banque Mondiale, l’UNODI ou la Commission Européenne.

L’élaboration actuelle du Programme national de redéploiement industriel (PNRI) se base notamment par l’utilisation des informations issues de la consultation des acteurs locaux, par le biais des forums départementaux. Ce document constitue de cadre du développement industriel à moyen terme (2011-2016), s’insérant lui-même dans la vision 2025. Les politiques et stratégies décrites dans ce PNRI constitueront le socle, l’axe-directeur des discussions lors du forum de Brazzaville.



Parlant des forums départementaux dans le cadre de  la PNRI, vous avez déclaré : « Le but [du forum du Pool] a été donc d'identifier sur le plan local les opportunités et les contraintes ». (Les Dépêches de Brazzaville, 29/12/2011). A l’état d’avancement actuel de la PNRI, quelles opportunités et contraintes avez-vous identifié ? Quelle en a été votre réaction ?

Cette identification dépend éminemment de chaque région, disposant chacune de ses avantages comparatifs. La région de Likouala possède par exemple de grandes potentialités dans le domaine de l’exploitation forestière ou agricole, mais souffre d’un fort enclavement. Le Pool, quant à lui, bénéficie d’un marché important, grâce à la proximité de Brazzaville et Kinshasa. La cuvette Ouest est une région propice au développement minier ou touristique, comme en témoigne le parc national d’Odzala. Cependant, l’accès reste difficile et le développement d’infrastructures  de communications ou d’accueil est nécessaire. Il faut donc profiter des spécificités de chaque zone tout en tenant compte des handicaps existants.



Nos lecteurs portent un intérêt particulier aux personnalités qui s’impliquent à une réalisation de qualité de notre projet. M. ADADA, votre engagement pour la nation congolaise est remarquable, ayant fait partie à plusieurs reprises du Gouvernement depuis 1977, puis vous avez été représentant spécial conjoint de l’ONU et de l’Union Africaine pour le Darfour entre 2007 et 2009, avant d’être nommé à votre poste actuel. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur votre parcours et vos réalisations ?

J’ai suivi une formation en mathématiques avant de devenir enseignant. Depuis 1976, j’ai commencé à avoir des responsabilités au Gouvernement, en tant que ministre de la Recherche Scientifique, ministre des Mines et de l’Energie et ministre de l’Enseignement Secondaire et Supérieur. Au retour du Président SASSOU N’GUESSO en 1997, j’ai pris les fonctions de Ministre des Affaires Etrangères pendant dix ans, et c’est à cette occasion que le secrétaire général de l’ONU, M BAN KI-MOON, et le président de l’Union Africaine m’ont proposé de diriger cette mission au Darfour en 2007. Deux ans plus tard, je suis revenu participer à la vie politique de la République du Congo au poste de ministre du Développement Industriel et de la Promotion du Secteur Privé.



La République du Congo présente un monde d’opportunités à qui est un bâtisseur. Malheureusement, cette réalité est souvent ignorée ou très peu connue en dehors des frontières du pays. Quel message délivreriez-vous aux lecteurs désireux d’entreprendre afin que ce pays bénéficie de l’image positive qu’il mérite ?

L’idéal serait d’inviter nos partenaires à visiter la République du Congo pour se rendre compte de la situation et des innombrables potentialités d’investissements. Cette démarche est évidemment initiée soutenue par la tenue prochaine du Forum du développement économique, mais aussi par la lisibilité offerte par votre site Internet et rapport. « Les opportunités sont très grandes pour faire de bonnes affaires, et ce, dans l’intérêt de tout le monde ».