The Republic of Guinea
from Rags to Riches












Mr. Aliou Diallo, Directeur Général du PAC



PORT AUTONOME DE CONAKRY

Interview de

Mr. Aliou Diallo,
Directeur Général

13 Avril 2000

Est-ce que vous pouvez nous donner un aperçu historique du PAC ?

Je vous remercie.Le port de Conakry a vu ses premières installations se réaliser dans la décennie 1929-1939. Celles-ci visaient tout juste à faire face aux besoins d'importations et d'exportations de la colonie jusqu'à l'indépendance .Depuis cette période jusqu'en 1982 il n'y a pas eu d'autres infrastructures L'outil portuaire actuel est le fruit de deux projets qui ont démarré en 1982 pour un coût total de 100 millions de dollars financés conjointement par la Banque Mondiale, la Banque Africaine de Développement, la Kfw et l'Etat Guinéen et qui s'est achevé en 1993

Ces importants investissements réalisés en deux phases entre 1983 et 1993 ont consisté en la construction de magasins, d'entrepôts, de terres pleins, de nouveaux postes à quai, la construction d'un terminal conteneurs d'une superficie de 8 hectares et d'une capacité installée de 54 000 TEU c'est à dire 54 000 boîtes de 20 pieds (TEU: unité de mesure correspondant à un conteneur de 20 pieds), d'un appontement pétrolier, l'acquisition de nouveaux engins flottants, l'équipement informatique et la formation du personnel.

A partir de 1987 un processus de privatisation a été engagé Cette privatisation concernait essentiellement l'ensemble des activités appelées auxiliaires maritimes c'est à dire la consignation, la manutention, le transit, et le transport à l'intérieur du port. Ces activités sont réalisées désormais par des sociétés privées agréées .

L'administration portuaire s'occupe de la gestion et de la sécurité des biens et des personnes qui évoluent à l'intérieur du domaine portuaire, du pilotage et du remorquage des navires à la rentrée et la sortie du port, du ravitaillement en eau des navires et de la gestion des contrats avec les usagers en l'occurrence les sociétés de consignation, de transit, de manutention et du transport avec lesquelles nous avons des contrats d'utilisation des entrepôts, des terres pleins, de la gestion des concessions avec un certain nombre de sociétés notamment FRIGUIA pour l'exploitation de l'alumine, SBK pour l'exploitation de la bauxite, les Grands Moulins de Guinée pour l'importation du blé et l'exportation de la farine de blé, les Ciments de Guinée pour l'importation du clinker. Les contrats de concession ont une durée qui varie de 20 à 30 ans. Ces concessionnaires disposent tous de leur propre équipement de manutention à l'intérieur du port. Ils s'approvisionnent en électricité à partir du port qui facture leur consommation

Quelle est la mission qu'assume le port vis à vis de l'Etat ?

Il s'agit d'abord de la gestion du domaine portuaire, la mise à disposition pour l'ensemble des projets et des entreprises, des capacités susceptibles de leur permettre d'accompagner leurs biens à l'extérieur, d'assurer la sécurité des biens et des personnes évoluant à l'intérieur et mettre le port au service du développement économique du pays .Le port intervient aussi dans le cadre de la rentabilisation des investissements que l'Etat a eu à réaliser sur la base d'un endettement. Bien évidemment l'Etat s'est endetté auprès des bailleurs de fonds institutionnels et a rétrocédé ce prêt au port à des conditions commerciales.

L'activité du port allait évoluer de façon croissante si le port pendant un certain nombre d'années n'avait pas connu de difficultés, dues à la baisse des activités économiques .

Le trafic a évolué dans les années 80 car il a atteint les 5 millions de tonnes par an. Par la suite, ce trafic a connu des problèmes du fait de la baisse de la production des sociétés minières FRIGUIA et SBK qui représentent à elles seules plus de 60% du trafic général . Ces dernières années on a enregistré un volume de trafic de 3 millions de tonnes par an. Les produits agricoles, les matériaux de construction exportés ont beaucoup augmenté bien que leur importance globale soit minime.

Ce mouvement de privatisation ne s'est pas arrêté, il a permis au port de qualifier ses prestations par rapport aux autres de la sous région. Au niveau des cadences le temps d'attente des navires est toujours respecté. À un moment donné on parlait des coûts élevés du port par rapport aux autres de la sous région parce que justement les investissements qui ont été réalisés ici se faisaient beaucoup plus ressentir que dans les autres pays. Malgré cela, le programme de privatisation a beaucoup contribué à améliorer la qualité des prestations, et a permis au port et à ses usagers de répondre au besoin de la clientèle dans les délais et selon les normes internationales.

Même avec des prix élevés, la fréquence s'est accrue ces années, il n'y a pas eu de report de trafic au détriment du port de conakry.

Quelle est la compétitivité du PAC par rapport aux autres ports ? Est-ce que vous pensez que le PAC est mieux équipé que les autres ports de la sous région ?

La compétitivité recouvre beaucoup d'aspects, il ne s'agit pas seulement des tarifs. En terme de tarifs, le port de Conakry se situe dans la fourchette des tarifs pratiqués par Dakar et Abidjan, chacun des ports étant dans une économie particulière. Ici nous avons la bauxite et l'alumine comme principaux produits en terme de trafic, ce qui est différent du Sénégal ou de la Côte d'Ivoire où vous avez une économie fortement agricole, un volume de produits agricoles exportables très important,et un type d'industries légères qui s'est mis en place, sans compter les raffineries, donc nous n'avons pas le même type de trafic . Nous avons justement fait faire une étude par un bureau d'étude allemand dans le cadre d'un troisième projet portuaire pour déterminer si le niveau des tarifs pratiqués s'agissant du trafic au port de Conakry se situait dans la fourchette des tarifs des ports de Dakar et d'Abidjan. Globalement pour ce qui est de la compétitivité par rapport au niveau des équipements , le PAC se situe très bien par rapport aux autres ports de la sous-région notamment Abidjan et Dakar. Les ports de Dakar et d'Abidjan ont bénéficié pendant ces dernières années des subventions pour des opérations de dragage, d'entretien de l'infrastructure portuaire, tandis que le port Autonome de Conakry depuis la mise en place de ses deux projets n'a pas bénéficié d'un franc de subvention de l'Etat, il vit sur ses propres ressources alors que les opérations de dragage ne se font pas à moins de 3 millions de dollars.

Quels sont les objectifs du conseil d'administration en ce qui concerne le démarrage de la troisième phase des travaux ? Est-ce que vous avez une vision à moyen terme de ce que vous escompter prendre comme part de marché dans la sous-région ?

Le conseil d'administration du PAC est composé de membres venant de l'administration qui représentent tous les départements de l'économie, les mines et géologie, les finances, la banque centrale, le plan et la coopération, l'urbanisme et l'habitat, les travaux publiques, la chambre de commerce, la chambre d'agriculture, et les opérateurs privés de manutention et de transit . Il s'agit ici de toutes les autorités impliquées dans les décisions qui concernent le port d'une façon ou d'une autre. Le Conseil d'Administration est conscient de la nécessité d'un 3ième projet portuaire pour permettre au port de répondre aux exigences d'une augmentation du trafic.

On ne peut pas dire jusque là qu'il n'y a pas eu de retour sur investissement parce que le trafic du port s'est énormément accru de 1982 jusqu'à aujourd'hui. À telle enseigne que les capacités qui y sont installées commencent à devenir dans une certaine mesure insuffisantes pour faire face aux besoins requis pour la mise en place des nouveaux projets entrepris dans le cadre du plan de développement économique de la " Guinée vision 2010 ". C'est pourquoi en 1997 nous avons procédé à la réactualisation du schéma directeur du port qui avait permis de bâtir ces deux premiers projets en faisant d'abord le point sur la situation du trafic du port entre 1980 et 1998. On s'est rendu compte qu'il y a eu une croissance moyenne de 3% par an et ensuite on a fait des simulations pour voir comment le trafic du port allait évoluer entre 1998 et 2010. On s'est inspiré du taux d'accroissement du produit intérieur brut (PIB) que le gouvernement avait utilisé pour bâtir son programme vision 2010. Pour ne pas être limité, on a tenu compte d'une hypothèse forte autour de 7% ; le pourcentage de 5% étant relatif au taux d'évolution du PIB annuelle retenue par le plan " Guinée vision 2010 " comme hypothèse moyenne. Après la préparation on a abouti à trois conclusions : la première était qu'il n'y avait plus d'espaces suffisants pour permettre aux sociétés de manutention de stocker leurs marchandises à l'importation comme à l'exportation. Nous sommes obligés en ce moment d'avoir 2 ou 3 sociétés dans un même entrepôt et ceci créé un certain nombre de problèmes de gestion du fait de l'intervention de différentes sociétés de gardiennage. La douane doit être en mesure de gérer des marchandises à la sortie des magasins, si chacune des sociétés avait son propre entrepôt, il n y aurait pas eu de problèmes. Et puis au niveau des terres pleins c'est la même chose, les espaces sont devenus assez restreints.
La deuxième conclusion de ce schéma directeur c'est que les capacités de manutention pour les marchandises diverses et en vrac sont suffisantes jusqu'en 2010 pour permettre de manutentionner la totalité des navires desservant le port.

La troisième conclusion, est que au titre de la manutention des marchandises conteneurisées, la limite de la capacité du terminal sera atteinte et dépassée en 2003/2004(poste à quai et aire de stockage). Ce qui signifie que l'extension du terminal est devenue une priorité.. En examinant ces trois conclusions on se rend compte qu'il y a deux contraintes majeures qu'il fallait lever si on ne voulait pas être minime en terme de capacit

physiques pour pouvoir accompagner le programme de développement de l'an 2010 c'est à dire qu'il fallait accroître les espaces du terminal conteneurs si non on risque d'être dans une phase de saturation à partir de 2003-2004.

Mais entre 1997 et 1999 la situation a évolué, on a eu plus d'espaces et au niveau du terminal conteneurs le taux d'évolution du trafic conteneurs s'est accru. En 1999 on a enregistré plus de 48.000 TU c'est à dire plus de 48.000 boites pour une capacité installée de 54.000 boîtes ce qui veut dire qu'au lieu de 2003-2004 c'est entre 2000-2001 que nous allons atteindre la saturation au niveau du terminal conteneurs. Ceci nous a prouvé que l'hypothèse moyenne que nous avons adopté comme hypothèse du troisième projet portuaire n'était pas évidente parce que les chiffres permettaient de corroborer qu'on était plus prêt de la réalité de l'hypothèse forte que de l'hypothèse moyenne.

Le 3 ième projet a été bâti sur deux principales composantes : l'extension du terminal conteneur sur 10 hectares en direction du Novotel pour doubler sa capacité actuelle, ensuite l'aménagement de toute la zone Est qui sépare le port de la partie dite 'Petit Bateau' sur une superficie de 30 ha environ pour réaliser les terres-pleins, les routes et voies d'accès, ainsi que les installations pour l'eau et l'électricité afin de permettre à certains opérateurs économiques et à l'ensemble des usagers qui le souhaiteraient d'accroître leurs surfaces, d'installer leurs propres entrepôts comme dans les autres pays voisins tels le Sénégal.Toutes les infrastructures et les équipements qui vont être réalisés dans le cadre de ce projet seront gérés par le privé, l'administration se limitant à avoir des relations contractuelles avec les différents opérateurs. Le coût total a été évalué à environ 73 millions de dollars. Nous sommes en contact avec les bailleurs de fonds qui ont l'intention de nous suivre, 'il s'agit de la KFW qui a accepté de financer l'étude de faisabilité , l'Agence française de Développement, et la Banque européenne d'Investissement . Nous allons approcher aussi les anciens bailleurs de fonds comme la Banque Africaine de Développement, la Banque Mondiale, la Caisse Française, le Fonds arabe.

Nous venons d'avoir une première rencontre avec les bailleurs de fonds à Frankfort en Allemagne au mois de Juillet de cette année dont les résultats sont très prometteurs.

Le 3ième projet permettra de doubler pratiquement la capacité du port au niveau trafic terminal conteneurs et dépassera la capacité de 5 millions de tonne dans la phase 2000-2005, pour avoisiner les 6 millions. Ce sont des simulations correspondant à la prise en compte de l'hypothèse moyenne, ce qui fait que nous avons été un peu pessimistes. En tenant compte de la position de notre port par rapport aux autres de la sous région, nous nous proposons de capter dans une première phase près de 10% du trafic malien, et à cet effet des atouts militent en notre faveur, des entrepôts ont été construits à l'intérieur du port pour le trafic de transit Malien et la route Kankan-Kourémalé qui relie les frontières des deux pays est en phase d'être réalisée à l'heure actuelle.

Nous ne devons pas perdre de vue qu'un port reflète l'activité économiqued'un pays, et dans la situation actuelle en terme de volume, le port de Conakry se compare au port de Dakar, lorsque vous prenez le port d'Abidjan il fait trois fois le trafic du port de Conakry et de Dakar. Ce qui est certain ,c'est qu'avec la mise en place de ce complément d'infrastructures nous nous positionnerons très bien parce qu'il n y aura pas du tout de report de trafic au détriment du port de Conakry par rapport aux ports de Dakar et d'Abidjan.Ce qui signifie que toutes les marchandises en provenance de l'Europe, de l'Amérique, de l'Asie destinées au marché guinéen débarqueront au port de Conakry. Ce qui en soi est un motif de satisfaction et d'encouragement tant pour le port que pour tous les opérateurs économiques car un trafic qui se fait à partir des feeders ne permettra pas de garantir un retour sur investissement réalisé au niveau du port de Conakry, à cause des délais supplémentaires qu'il engendre.

Est-ce que vous pensez que l'activité du port permettra de développer l'activité économique. Au delà du temps comment vous situez le rôle du port dans la situation économique du pays ?

Dans la situation actuelle le port fait partie de l'une des principales entreprises de pointe pour la réalisation des activités du FMI. Tout investisseur sensé de réaliser un quelconque investissement en Guinée qui va engendrer du fret à l'arrivée ou au départ,se pose toujours la question de savoir si les capacités physiques requises pour la manutention des marchandises ou des équipements à l'arrivée ou au départ sont disponibles au niveau du port de conakry. Le port en tant que tel, doit pouvoir disposer des installations qui vont être de nature à rassurer les investisseurs sur la possibilité de garantir la rentrée ou la sortie de tous leurs équipements. Le port joue le rôle de locomotive dans l'économie parce que tous les échanges transitent au port, c'est exactement en terme de comparaison le rôle que jouent les poumons dans un organisme vivant. L'administration portuaire ne raisonne pas en tant qu'administration, elle raisonne en tant que place portuaire c'est à dire qu'à chaque fois que nous essayons de résoudre les problèmes qui se posent à nous pour rendre le port compétitif par rapport aux autres ports de la sous région, nous résonnons avec les opérateurs privés qui sont dans l'enceinte portuaire. C'est cela le marketing du port de Conakry par rapport aux autres ports de la sous région. C'est ce qui à notre avis constitue un atout majeur parce que l'administration ne peut pas tout faire et les opérateurs privés avec les quels nous travaillons sont des opérateurs liés à des maisons mères nanties d'une certaine capacité de financement, et d'une expertise professionnelle vendable pouvant profiter tant au port qu'à l'Etat.

Quel est votre message final ?

La Guinée dispose d'un port et au regard des potentialités minières et agricoles dont il regorge, c'est un privilège lorsqu'on sait en profiter. Je lance un appel à tous les opérateurs guinéens de se préoccuper de ce qui se passe au port et de voir ce qui doit y être réalisé pour permettre d'accroître le volume de leurs activités. Quant aux opérateurs privés du transport maritime, je veux parler des sociétés de consignation, de manutention, de transport, de transit qui évoluent avec l'administration portuaire pour satisfaire les besoins aussi bien des opérateurs que sont les chargeurs d'un côté, les transporteurs de l'autre, c'est à dire les armateurs , je leur lance le message de la nécessité de faire du partenariat, que chacun trouve le temps et la nécessité d'évoquer dans nos entretiens réguliers les problèmes qu'il rencontre et qu'il souhaite partager afin que soient trouvées des solutions efficaces qui répondent aux attentes des uns et des autres.

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© World INvestment NEws, 2000.
This is the electronic edition of the special country report on Guinea published in Far Eastern Economic Review (Dow Jones Group)
September 28th 2000 Issue.

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