Q1 - M. Touré,
tout d'abord merci de nous recevoir. Pour commencer
cette interview,
pourriez-vous retracer brièvement l'évolution
de l'UGAR ces dernières années ?
A1 - Je vous remercie encore une fois de
l'opportunité que vous me donnez, de m'adresser
aux lecteurs de vos publications, surtout pour parler
de l'évolution de l'UGAR.
Il y a lieu de souligner d'entrée de jeux
qu'au cours des trois dernières années,
l'UGAR a évolué dans des conditions
environnementales très difficiles.
? En 2000, à partir du 1er septembre,
la Guinée a été victime des
agressions armées sur plus de 1 000 km
de frontières. Ce qui a provoqué
des pertes en vies humaines, des dégâts
matériels importants, et des déplacements
massifs de populations des préfectures
attaquées vers celles considérées
paisibles. Ces destructions et ces mouvements
de populations, ont naturellement ralenti les
activités économiques sur l'ensemble
du territoire national.
UGAR, comme la plupart des opérateurs
économiques, qui couvrent le territoire
national par leurs implantations, a enregistré
une chute d'activités significatives. En
effet si au cours des 3 premiers trimestres le
chiffre d'affaires a progressé de 15% par
rapport à la même période
de l'exercice précédent, force est
de constater qu'il a enregistré un brusque
et important recul au cours du 4ème trimestre,
en raison notamment de la fermeture des points
de vente de Guéckédou, Macenta et
Kissidougou.
Suite donc principalement aux agressions armées,
la société a enregistré une
baisse de chiffre d'affaires de 8,2% (de 4,405
milliards en 1999 à 10,464 milliards en
2000).
? En 2001, les attaques armées se sont
poursuivies jusqu'en mars, avec leurs corollaires
de destructions, de morts, de déplacements
des populations et naturellement de ralentissement
voir de gel d'activités. C'est dire que
l'année 2001 avait mal commencé
Comme si cette dégradation sécuritaire
générale de l'environnement ne suffisait
pas, UGAR a subi en avril 2001 les méfaits
d'une dégradation juridique, suite à
une décision de justice pleine d'irrégularités,
car non fondée ni dans la forme ni dans
le fond.
Dans la forme l'arrêt contradictoire de
la Cour d'Appel n° 26 du 19 décembre
2000 donnant droit à l'UGAR, a été
attaqué et ses effets annulés, suite
à une requête civile introduite le
30 janvier 2001 par violation de l'article 660
du CPCEA, dont les dispositions sont pourtant
d'ordre public. Le délai de la requête
étant d'un mois à compter du jour
où la partie a eu connaissance de la cause
de rétractation qu'elle invoque, la démarche
entreprise le 30 janvier 2001 par Etoile Auto
Guinée était de nature irrecevable,
parce que tardive et forclose.
Dans le fond, la garantie n'était pas
acquise, car les conséquences directes
et indirectes de la mutinerie militaire étaient
expressément exclues dans le contrat liant
Etoile Auto Guinée à l'UGAR, comme
ça l'était avec plus de 33 autres
assurés de l'UGAR victimes de la mutinerie.
Les autres sociétés de la place
qui avaient donné les mêmes types
de garanties ont aussi rejeté les réparations
des dommages subis par leurs clients. Cette position
était si juste que pratiquement tous les
clients l'ont acceptée et que l'Etat avait
pris des dispositions d'ordre public en :
§ Demandant à toutes les victimes,
matérielles les victimes corporelles et
les ayants droits de se constituer parties civiles
contre l'Etat (décision de la Cour de Sûreté
de l'Etat qui a eu à connaître l'affaire
des mutins) ;
§ Indemnisant certains gros opérateurs
par notamment des exonérations fiscales
et douanières. Etoile Auto Guinée
fait partie des opérateurs économiques
qui ont bénéficié des actions
de réparation de l'Etat.
En dépit de ce non droit, et des actions
de réparation déjà obtenues,
Etoile Auto Guinée a fait condamner l'UGAR
à lui payer plus 2,691 milliards de francs
guinéens au titre des dommages subis lors
de la mutinerie militaire des 2 et 3 février
1996.
Quand on sait que les capitaux assurés
pour le site qui a subi les dommages ne dépassaient
pas 100 millions de francs guinéens, on
ne peut pas ne pas qualifier tout ceci de cabale
juridico-financière.
Les réassureurs ne pouvant suivre la cédante
UGAR dans un tel contexte de non droit, la démarche
visait simplement à couler la société,
pour la reprendre en sauveur.
? Depuis 2001 ce contentieux juridico-financier
continue à préoccuper l'encadrement
de la société jusqu'à maintenant.
Certes il y a eu une ordonnance de suspension
d'exécution, mais ceci ne règle
pas définitivement le problème de
cette mauvaise décision dont les méfaits
latents et nocifs continuent de nuire
Heureusement que la clientèle dans sa
grande majorité continue à nous
faire confiance ; ce qui explique les bonnes progressions
de notre chiffre d'affaires, soit 16% en 2001
et 27% en 2002.
Cette confiance de la clientèle se justifie
essentiellement par la qualité de nos prestations,
et par la rigueur de notre système de gestion
qui permet de résister aux tentatives et
pressions pour le payement des indemnités
non dues.
Q2 - Vous avez parlé d'un chiffre d'affaire
de 15,5 milliards en 2002. Pour ce faire, combien
de clients compte UGAR aujourd'hui ?
A2 - Je ne pourrais pas vous dire. Nous travaillons
dans plusieurs branches et nous avons des clients
qui se recoupent. Quand vous faîtes le traitement
statistique par rapport aux produits, vous retrouvez
le même client en automobile, en vie, en habitation
On n'est pas arrivé à le compter une
seule fois, même s'il est 4 fois chez nous.
Q3 - Et d'un point de vue interne, combien
de personnes travaillent pour UGAR ?
A3 - Environ 90 personnes, sans compter les
mandataires que sont les 17 Agents Généraux
dont les structures sont implantées dans
tout le pays. Eux mêmes et leurs personnels
ne sont pas considérés comme les employés
de la société, ils exercent en fait
une activité de sous-traitance.
Q4 - Selon vous, quelle est la spécificité
de l'UGAR qui fait que vous êtes n°1
?
A4 - La première spécificité
est que l'UGAR a dans son tour de table le Groupe
AXA qui détient 40% du capital de la société.
Ce Groupe assure aussi l'assistance technique de
la société, par la mise en place des
approches clientèles et des procédures
de gestion qui ont fait leurs preuves sous d'autres
cieux. A cet effet AXA détache du personnel
pour servir dans la société, effectue
les contrôles sur place et organise à
l'intention de l'encadrement des stages et des séminaires
de formation. L'UGAR bénéficie de
toutes les synergies offertes par son appartenance
à ce Groupe Mondial de tout premier ordre.
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La deuxième des
spécificités est le paiement rapide
de tout ce qui est dû, et éviter de
se prostituer par des considérations non
professionnelles dans la gestion des prestations.
A ces spécificités il faut ajouter
la qualité exceptionnelle de nos réassureurs
qui sont les partenaires indispensables de toute
société d'assurance. Le portefeuille
des affaires souscrites à l'UGAR bénéficie
ainsi d'une protection efficace de couverture
en réassurance. Si vous ajoutez à
tout cela la qualité des ressources humaines
de notre société, vous comprendrez
pourquoi elle est la société de
référence du marché.
Q5 - Justement, en terme de partenariat, vous
nous avez parlé de l'AXA, mais quels sont
les autres partenaires ?
A5 - En termes d'actionnariat, le tour de
table de l'UGAR est constitué de trois Groupes
qui se répartissent le capital comme suit
: 40% pour AXA S.A., 35% pour l'Etat guinéen
et 25% pour les privés guinéens.
En termes de réassurances, citons AXA
CESSIONS, AXA-RE, MUNICH-RE, AFRICA-RE, GENERALI,
SUISSE-RE etc
En termes d'intermédiaires l'UGAR travaille
avec les grands courtiers internationaux tels
que MARSH, GRAS SAVOYE, CECAR et JUTHEAUX, et
aussi avec les courtiers nationaux pour la couverture
des risques domestiques.
Quant aux grands courtiers, ils nous aident à
protéger les patrimoines, chantiers et
entreprises dont les financements sont d'origines
extérieures.
Q6 - Quelles sont les priorités actuelles
de l'UGAR ?
A6 - Les priorités de l'UGAR sont
de trois ordres.
La première, c'est améliorer le
chiffre d'affaires de la société;
que nous voulons toutefois sain. Nous ne souhaitons
pas faire des progressions qui pourraient se retourner
contre nous en terme de résultat. Notre
première priorité est donc de progresser
dans le cadre d'une bonne sélection des
risques.
La deuxième priorité est de renforcer
l'amélioration des prestations, dans un
marché où l'assurance n'est pas
la première denrée.
Il y a notamment une faible culture d'assurance
qui nécessite un plan de communication
patiente et efficace, surtout que les cibles sont
souvent courtisées et embrigadées
dans toutes sortes d'association d'assistance.
Peut-être la communication doit faire percevoir
que l'assurance est un plier de l'assistance sociale,
où tout au moins un complément de
l'assistance dans le contexte africain
Le développement des produits d'assurance
épargne est notre troisième priorité.
Que ce soit dans le cadre de la protection santé,
de l'épargne retraite ou de toute autre
protection financière, les structures étatiques
n'ont pas souvent donné de bons résultats.
C'est pourquoi les sociétés commerciales
d'assurance ont, grâce à de bonnes
prestations, plus de réussites dans la
satisfaction de leurs clients.
Le développement des produits Vie (épargne
et retraite), qui génèrent de l'épargne
longue, susceptible d'être investie sur
de longues périodes, est cependant confronté
à une lourde fiscalité. Des démarches
sont initiées auprès de l'administration
fiscale pour favoriser la distribution des produits
Vie. Les 5% de taxe à la souscription sont
exorbitants, quand on sait que dans les autres
pays de la sous région cette taxe n'existe
pas, si non elle ne dépasse pas 1%
Q7 - Est-ce qu'aujourd'hui UGAR est à
la recherche de nouveaux partenaires ?
A7 - Pas particulièrement En ce qui
concerne les actionnaires je ne puis me prononcer,
tout dépend de leur propre volonté
de partir ou de rester dans la société.
Si non, la composition actuelle du capital me paraît
satisfaisante.
Quant aux réassureurs, leur portefeuille
évolue en fonction de la qualité
et de l'importance des risques que la société
prend en charge. Il évolue surtout en fonction
de l'origine des financements des risques à
couvrir. Dans tous les cas, l'ossature de qualité
mentionnée ci-avant est constituée
de nos vieux et permanents partenaires. La recherche
des meilleures conditions de réassurance
doit en fait être conjuguée avec
la solidité et la notoriété
internationale des réassureurs.
Q8 - Comment dernière question, en
tant que Directeur Général d'UGAR,
quelle est votre
plus grande satisfaction ?
A8 - Ma plus grande satisfaction, c'est d'abord
de pouvoir, dans un environnement africain et guinéen
de surcroît, tenir la société
la faire progresser en termes de chiffre d'affaires,
de prestations et de résultats pendant plus
de 10 ans. Ce qui signifie que nous avons pu préserver
les emplois pour plus de 300 personnes. L'autre
satisfaction est d'avoir pu conserver une clientèle
de qualité, composée essentiellement
d'entreprises et de personnel d'entreprises.
Enfin la gestion du lourd contentieux avec le
client Etoile Auto Guinée suite à
la mutinerie des 2 et 3 février 1996, a
aussi été très instructive
; la mobilisation des sympathies à tous
les niveaux de la société guinéenne
pour lutter contre l'injustice et la cabale financière,
a aussi été un autre motif de satisfaction,
même si nous ne sommes pas encore au bout
de nos peines. L'espoir fait vivre.
Q9 - Un message final à nos lecteurs
de l'Express ?
A9 - Je ne vous apprendrai rien en vous disant
que la Guinée est un beau et riche pays,
parce que vous êtes en séjour à
Conakry, et pour certains d'entre vous c'est le
2ème ou 3ème séjour.
C'est un pays qui possède d'importantes
richesses du sol et du sous-sol, des forêts,
des réserves énergétiques
et par dessus tout, des populations intelligentes
et très accueillantes. On a naturellement
pas le droit de laisser toutes ces richesses inexploitées.
C'est pourquoi je fais appel aux vrais investisseurs,
c'est-à-dire ceux qui savent prendre les
risques pour fructifier leur patrimoine, autrement
dit des pionniers. Tout n'est pas effectivement
parfait. Que les investisseurs potentiels ne pensent
pas qu'en venant investir en Guinée, il
suffira d'appuyer sur un bouton pour obtenir la
meilleure communication, ou toucher un autre pour
éclairer sa demeure
Venir investir en pionnier c'est venir participer
à la réalisation de toutes ces commodités
pour une exploitation optimale des richesses de
ce pays, et c'est au bout de cet effort conjugué
avec les ressources humaines locales qu'il y aura,
nous en sommes sûrs, un juste retour sur
investissement.
Je vous remercie.
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