Mauritania: Interview with S.E.M. Ba Madine

S.E.M. Ba Madine

Ministre de l\'Artisanat et du Tourisme (Ministère de l\'Artisanat et du Tourisme de Mauritanie)

2008-02-26
S.E.M. Ba Madine

Q : Pouvez-vous nous expliquer la mission et les responsabilités du Ministère de l’Artisanat et du Tourisme ?

R : La mission principale du ministère de l’artisanat et du tourisme est de concevoir et mettre en œuvre la politique nationale en la matière. Cette politique s’inscrit en droite ligne des engagements pris par le président de la République, Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, de développer un certain nombre de secteurs économiques dont la promotion doit concourir à la réduction de la pauvreté dans le pays. En fait, concevoir, définir et mettre en œuvre une politique constituant une réponse adéquate à l’impératif de lutte contre la pauvreté par une action de promotion du patrimoine culturel et artistique national, le développement du tourisme devant donner une valeur économique au patrimoine cité en référence.

Q : Votre Ministère a évalué à plus de 3 millions d’euros les pertes dues directement à l’annulation du Dakar pour la Mauritanie. Avez-vous un plan de communication pour combler le déficit d’image ?

R : Nous sommes en train d’élaborer une large stratégie de communication et de promotion de l’image de la Mauritanie. Beaucoup de choses ont été dites et écrites sur la Mauritanie au cours des dernières semaines. La nouvelle politique de communication que nous allons mettre en œuvre vise essentiellement à modifier au niveau extérieur la perception qu’on a de la Mauritanie et donner une vision réelle de la Mauritanie : un pays de paix, de sécurité, d’hospitalité et de tolérance.

Celle-ci va concerner plusieurs aspects relatifs aux actions de promotion, notamment des invitations à des groupes de presse internationaux et de Tours Opérators de venir sur place vivre les réalités mauritaniennes et les relater à travers leurs colonnes, rapporter ce qu’ils ont vécu. Nous avons également dans nos projets l’organisation d’un certain nombre d’événements à l’intérieur du pays comme à l’extérieur. La tenue prochaine à Paris, à la Maison de l’Afrique, de journées pour la promotion du tourisme, de l’artisanat et de l’investissement en Mauritanie en fait partie. Nous avons également prévu la réalisation d’un film documentaire sur les potentialités touristiques et les opportunités d’investissement en Mauritanie. Nous avons prévu d’autres manifestations, débats et conférences de presse au cours desquels nous comptons remettre de l’ordre et restaurer l’image de notre pays. Celle-ci a été injustement malmenée par certains médias très éloignés de la réalité concrète, qui donnait l’impression de parler d’un autre pays. S’ajoute à cela, notre participation à divers événements en Europe et ailleurs dans le monde.

En marge de ces différentes manifestations il y aura également des séminaires, colloques et réunions de travail pour réellement assurer la promotion de l’image de la Mauritanie et montrer tout l’attrait de cette destination touristique.

Q : Quelles sont les principales opportunités d’investissement dans les secteurs de l’artisanat et du tourisme en Mauritanie ?

R : Il faut d’abord dire que la Mauritanie dispose d’un gros potentiel touristique, de grands atouts qui permettent de développer le secteur. Le premier de ces atouts est politique, avec la construction d’un État garantissant l’ensemble des libertés. Cette démarche visant à renforcer la démocratie et l’état de droit en Mauritanie découle d’un engagement du président de la République qui s’inscrit dans un ordre d’évolution tout à fait normal. C’est là le premier gage de confiance offert aux partenaires et autres investisseurs. Il y a un apaisement du climat politique et des rapports pouvoir-opposition avec l’institutionnalisation du statut du chef de file de l’opposition. Celui-ci ayant rang de ministre, avec tous les avantages d’un membre du gouvernement et un cabinet à la charge de l’Etat. D’où le rôle d’une opposition réelle et responsable, participant par ailleurs à la construction et à l’œuvre nationale de développement. Il s’agit en fait d’un cas rare à travers le monde.

Nous bénéficions également un climat propice aux affaires, concrétisé par la décision présidentielle de créer une Délégation Générale à la Promotion de l’Investissement Privé (DGPIP), dont la gestion est confiée à un cadre issu du secteur privé. Il a rang de Ministre qui a donc l’avantage de connaître parfaitement les besoins, les exigences et les contraintes de l’investissement privé, en somme, la réalité du milieu. Ainsi, le DGPIP est en train de travailler à l’adoption d’un nouveau code des investissements qui présentera l’avantage d’être très pratique et plus attractif pour tous ceux voudraient investir en Mauritanie.

Un autre atout est lié à l’engagement du gouvernement dans la mise en place d’une politique de promotion de la bonne gouvernance. On peut citer à ce titre la création pour la première fois d’une Haute Cour de Justice (HCJ), l’obligation pour les membres du gouvernement et hauts fonctionnaires de produire préalablement à leur entrée en fonction une déclaration de patrimoine. Tout ceci crée un ensemble de conditions de nature à favoriser la bonne gouvernance et à sécuriser l’investissement.

Pour les atouts du secteur du tourisme proprement dit, il faut évoquer la diversité des potentialités. Ici nous avons le désert. Certes, ailleurs dans le monde le désert existe également, mais il n’est pas habité. Ce qui est remarquable en Mauritanie c’est la formidable opportunité de découvrir cette fascinante étendue et les hommes qui l’habitent, ce qui en fait une vraie particularité. Notre pays abrite aussi quatre grandes villes historiques classées patrimoine mondial par l’UNESCO, dont la découverte est un atout essentiel pour tous ceux qui aiment l’histoire et veulent la comprendre. D’autres cités historiques comme Aoudaghost sont aussi répertoriées. Il y a les manuscrits anciens dont la conservation même pose des problèmes.

La Mauritanie dispose également d’une façade maritime longue de plus de 720 kilomètres. Des côtes vierges de toute forme de pollution, au niveau desquelles ont trouve quelque chose d’exceptionnel. C’est une réserve naturelle entre l’océan et le désert.

Nous avons près de 800 kilomètres de frontière commune avec le Sénégal dans la vallée du fleuve. Il s’agit d’une frontière naturelle entre un fleuve et le désert.

Désert, océan, fleuve ; autant de choses associées et qu’on ne découvre qu’en Mauritanie. Nous avons également la possibilité de développer l’éco tourisme. Notre pays dispose de deux grands parcs nationaux : le Banc d’Arguin et le Diawling. Des lieux où l’on peut découvrir des espèces d’oiseaux très variées, pour tous ceux qui portent un intérêt à des études relatives à ces espèces. La pêche sportive et la chasse y présentent aussi un grand intérêt.

Par ailleurs, les amateurs de tourisme peuvent découvrir la vallée du fleuve Sénégal avec ses populations qui ont un mode de vie très différent de celui des nomades du désert. Ce qui fait ressortir la vocation de la Mauritanie comme trait d’union naturel entre le Maghreb et l’Afrique subsaharienne. Un pays qui puise sa richesse de sa diversité et surtout de la diversité des cultures qui se croisent, de sa position géographique. Ce qui en fait une terre d’échanges, en un mot, une terre des hommes.

Voilà en gros la vaste panoplie de potentialités politiques et touristiques dont dispose la Mauritanie. Il faut ajouter à cela les traditions légendaires d’hospitalité, d’ouverture et de tolérance. Des qualités naturelles qui ont quelque part et pendant longtemps, constitué, paradoxalement, un frein au développement des activités touristiques. Dans la sphère psychologique traditionnelle du mauritanien il est inconcevable de faire payer à un étranger qui vient vous voir son hébergement et sa nourriture. L’exigence naturelle chez le mauritanien qui reçoit un hôte est de le loger chez lui et non à l’hôtel.

Q : Quelle promotion faites vous pour attirer l’investissement étranger direct dans les secteurs de l’artisanat et du tourisme ?

R : Les opportunités d’investissements dans ce domaine sont énormes. Nous avons l’ambition de développer le tourisme, donc de recevoir des dizaines de milliers de candidats à la destination Mauritanie. Notre capacité d’accueil actuelle atteint à peine les 7000 lits. C’est dire que, compte tenu de nos ambitions, tout reste à faire dans le domaine de la mise en place d’une infrastructure hôtelière et touristique à la hauteur. Celui qui viendrait investir dans le secteur touristique et hôtelier n’aurait pas besoin d’entreprendre des actions de promotion. Nous faisons actuellement un effort, lié justement à l’assainissement du climat des affaires déjà évoqué. Le secteur aura notamment beaucoup de facilités et une réelle incitation pour l’acquisition de terrains à usage d’infrastructures, des facilités fiscales. En somme l’Etat va encourager grandement toute forme viable d’investissements dans le secteur du tourisme et de l’artisanat. Nous sommes également entrain de mettre en place un dispositif pour faciliter le flux touristique : délivrance de visas à l’arrivée, création d’un guichet unique, facilitation et accélération des procédures. Ces dernières sont rendues encore plus rapide quand il s’agit d’un groupe organisé avec un accomplissement rapide de toutes les formalités administratives, avant même l’arrivée du vol. Toutes ces mesures étant destinées à encourager davantage le flux touristique et le flux de l’investissement.

Q : Considérez-vous actuellement que la communication du secteur touristique mauritanien n’est pas suffisante ?

R : Effectivement nous avons un déficit dans le domaine de la communication. Si les atouts et potentialités ne sont pas connus et appréciés il est difficile de les faire découvrir. Donc, il est fondamental pour nous de mettre en œuvre une stratégie nationale de communication visant à mieux faire connaître le pays. Nous avons le devoir impérieux de combler cette lacune.

Q : Pouvez-vous nous éclairer un peu sur votre parcours personnel ?

R : Je suis membre du gouvernement depuis avril 2007. Avant cela, l’essentiel de ma carrière s’est passé dans la formation professionnelle. J’ai été directeur d’une école de formation professionnelle de 1984 à 2005. A partir de 2005 j’ai été nommé directeur maritime des pêches au niveau de Nouadhibou (capitale économique et ville portuaire située à 465 kilomètres au Nord de Nouakchott). J’ai géré pendant 2 ans, au cours de la transition les aspects liés à l’assainissement et la moralisation du secteur des pêches artisanale et industrielle, le recrutement des marins, dont la plupart naviguaient à l’époque sans aucune couverture sociale. Un problème que nous avons pu régler. Nous avons pendant la même période fait adopter la convention collective maritime.
Tous ces problèmes ont pu être réglés, grâce au dialogue fécond établi entre l’administration, les syndicats et les armateurs.

Depuis ma nomination à la tête de ce département ministériel, le travail se fait grâce à l’accompagnement d’une équipe remarquable pour la mise en place d’une stratégie de développement des secteurs de l’artisanat et du tourisme.