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 Algeria
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Mr. Mustapha Rebbouh, Président Directeur Général de SONATRO

SONATRO

Interview de

Mr. Mustapha Rebbouh,
Président Directeur Général

Alger, le 3 mars 2001

Pourriez-vous nous donner un bref historique de la Sonatro ?

Sonatro est une entreprise de réalisations de routes, d'autoroutes et d'aérodromes. Elle a été créée en 1968 et a subi quelques aménagements en cours de route mais le plus grand changement a eu lieu en 1982: l'éclatement de l'entreprise dans le cadre de la restructuration. La Sonatro a donné naissance à une entreprise d'ouvrage d'arts qui, aujourd'hui est la ENGOA, deux entreprises à l'Est, une à Skikda et une à Batna, une entreprise au Centre qui est Médéa et une de ses filiales à Oran qui est rattachée au BTP Oran. La Sonatro était restée à l'époque à caractère national puisqu'en 1982 les autres avaient un caractère régional. En 1982, Sonatro était resté nationale et a gardé pratiquement tous les corps de métiers essentiels sauf les corps d'arts de métiers qui a été spécialisé. Il y a aussi eu l'avènement de 1990 où l'entreprise a été transformée en société par actions donc, la Sonatro fonctionne présentement sous forme d'une entreprise par actions.

Quelle a été l' évolution de votre chiffre d'affaires depuis les 3 dernières années ?

La réalisation de routes, d'autoroutes et d'aérodromes, c'est d'abord les terrassements. C'est la mise en œuvre des OEP, donc la réalisation des routes. La Sonatro a ses propres carrières qui sont au nombre de 11, donc la capacité est de plus de 1 million T/an, avec une capacité installée de 12 plans d'enrobage.

La Sonatro est passé par des pointes de réalisation dans le domaine des terrassements de l'ordre de 3 millions de m3. Les enrobés, nous en faisons jusqu'à 800.000 T/an, ce qui est énorme. En chiffre d'affaires en dinars cela tourne aujourd'hui autour d'un peu moins de 3 milliards/an, et c'est pour cela que j'ai préféré commencer par les quantités physiques qui sont beaucoup plus significatives que le chiffre d'affaires.

Vous dites que maintenant la situation s'est améliorée. Qu'en était-il pendant les événements qu'à connu l'Algérie et qu'elle est la situation actuelle ?

Nous sommes passés par un palier de stagnation, voire une baisse avant même ces trois dernières années. Il est vrai que l'entreprise a été carrément en convalescence ces cinq dernières années, ce n'est que depuis ces deux ou trois dernières années qu'elle commence à reprendre vraiment.

Pourquoi va elle reprendre? Parce que d'abord il y avait un effectif qui était important, de 4.500 travailleurs et aujourd'hui nous tournons à 2.500. Nous avons changé la relation de travail car nous avions un personnel qui était permanent, et aujourd'hui nous tournons avec 70 éléments permanents, ce qui permet donc de faire fluctuer le personnel sur le plan de charge. Nous avons 2 années et demi de plan de charge assuré.

La période de laquelle je parle était le creux de la vague tant sur le plan de charge que sur le plan des investissements et ces dernières années, il y a certainement une relance en matière d'investissement et en matière de plan de charge.

Cette relance au niveau des investissements se dirige vers quels secteur d'activité ?

Nous voulons rester spécialistes dans le domaine des routes, d'autoroutes et des aérodromes. Nous avons quelques tentatives dans le domaine des hydrocarbures, dans celui de l'hydraulique mais je pense que cela demandera du temps, de la spécialisation, et de la formation.

Notre métier de base, ce sont les routes et tout ce qui touche au terrassement et au travail d'enrobé et béton. Nous sommes l'entreprise leader dans le domaine des travaux publics. Pourquoi ? Parce que nous faisons un travail en conformité avec les normes, nous essayons même d'aller un peu plus loin en innovant puisque nous faisons partie maintenant d'un comité qui vient d'être nouvellement créé pour la mise en place de nouvelles technologies. Nous avons toujours été à l'avant-garde de la mise sur scène des nouvelles techniques qui étaient difficilement mises en œuvre, car les gens ne suivaient pas, soit par manque d'intérêts, soit par manque de crédit, soit par manque de capacité de suivi.

Diriez vous que Sonatro est à la pointe de l'innovation ?

Je vais vous donner quelques exemples: lorsque nous avons été au Sud, il y a des régions où il n'y a presque pas de cailloux, donc il faut transporter des agrégats sur de longues distances de 100 km et plus. Comme vous pouvez l'imaginer cela induit des coûts important, et évidemment des délais plus longs, parce qu'évidemment il faut ramener des matériaux sur de longues distances.

Nous avons innové en mettant en place des tronçons d'essais, des planches d'essais en utilisant du sable des dunes qui a donné jusqu'à ce jour des résultats importants, il faudrait maintenant que l'administration vienne nous seconder pour essayer d'élargir l'utilisation de cette technique.

Un deuxième effort a été fait en matière de recyclage, c'est-à-dire que nous prenons une fraiseuse, on met uniquement de l'émulsion, on fraise le matériau qui est sur place et on le compacte sans apport d'aucun matériau nouveau si ce n'est les émulsions. Donc cette technique est très bonne pour les régions du Sud ; cela permet de réhabiliter la route sur plusieurs années, sans apport nouveau mais dsur des routes où il n'y a pas de très grandes circulations telles que les autoroutes, par exemple.

Le troisième exemple est le fraisage. Ensemble avec l'administration d'Alger, nous sommes en train de faire la réutilisation des fraiseurs, c'est-à-dire que les matériaux récupérés au niveau de la chaussée vont être recyclés, régénérés par un peu de sable et de gravier nouveau et de bitume de petite quantité et le remettre sur les chaussées.

Donc, nous avons un gain important au niveau du bitume qui coûte déjà très cher, particulièrement les agrégats où vous savez au nord de l'Algérie il y a un très gros problème en sable et en cailloux, puisque maintenant l'environnement s'y met aussi. Nous sommes aussi en train d'organiser l'introduction de l'utilisation de laitiers de hauts fourneaux, ce que l'on appelle les graves laitiers, le 12 mars avec la société française, Mecaroute. Et nous avons aussi invité l'Agence des autoroutes, des ministères et pas mal de partenaires dans l'administration et nos clients pour essayer de faire passer cette formule qui permet non seulement d'utiliser des matériaux locaux, d'avoir une tension un peu plus faible en matière de bitume et d'avoir des chaussées qui coûteraient moins cher. Voilà, pour ne citer que ces quelques cas en matière d'innovation.

Dans votre cahier de charges, la priorité est plutôt la réhabilitation des routes, ou la construction de nouvelles routes de manière à désenclaver certaines régions du pays ?

Dans le cadre de l'autoroute est-ouest, il y a trois tronçons qui sont en cours: le contournement de Constantine, le contournement de Lakhdaria et le contournement de Blida. Pour le contournement de Blida, nous sommes seuls, donc c'est un tracé nouveau dans le cadre de l'autoroute est-ouest. Dans le contournement de Lakhdaria, le tronçon est coupé en deux ; une partie pour Cosider, une partie pour Sonatro et le contournement pour Constantine, nous le faisons en partenariat avec une entreprise italienne. Donc, c'est pour vous dire que nous nous sommes déjà engagés sur de nouveaux tracés.

Au Nord et dans quelques régions du Sud, nous faisons aussi beaucoup de renforcements, surtout dans le cadre des projets financés par la Banque mondiale et la Banque africaine, et nous sommes à l'origine de la route de Djanet-Illizi, un nouveau tracé qui a été carrément réhabilitée.

Quels sont les avantages de la Sonatro par rapport à ses principaux concurrents?

L'avantage de la Sonatro est sa carte de visite. Je crois qu'en matière de prix, nous étions forts un certain moment, nous ne le sommes plus. A tel point que les gens nous disent: " vous êtes en train de casser les prix." Pourquoi ? Parce que non seulement nous avons réduit les effectifs, donc c'est une charge en moins, et avec des effectifs moindres, nous faisons le même chiffre d'affaires, si ce n'est plus. Sonatro est également connu par les ouvrages qu'elle a fait, et en ce qui concerne les aérodromes, nous en sommes au treizième réalisé.

Et au niveau de l'aspect des délais de construction ?

Pour les délais de construction, vous savez, je crois que l'argent est le nerf de la guerre. Si les crédits sont disponibles, l'entreprise avance rapidement. Je vous donne un exemple: l'aérodrome de Hassi R'Mel que nous avons réalisé pour Sonatrach - puisque Sonatrach a de l'argent, nous l'avons réalisé en deux mois.
Les projets sont en général dans les délais, et il faut être honnête, il y a des projets qui sont hors délais pour des contraintes objectives, soit de financement, soit des problèmes techniques, soit pour des raisons qui ne nous permettraient pas de travailler à l'aise au point de vue amplitude horaire, déplacement de matériels le soir dans des lieux sécurisés, etc. Cela crée un peu la perturbation. Mais disons en gros que les délais sont respectés.

Vous avez évoqué deux partenaires: un français et un italien. Qu'en est-il ?

Nous avons toujours cherché des partenaires. Nous sommes capable de trouver des partenaires pour nous accompagner sur des ouvrages nouveaux, en matière de nouvelles techniques, en matière d'amélioration de ce que nous sommes en train de faire et de la mise en œuvre en Algérie de toutes les nouvelles techniques qui sont en train de se faire actuellement à travers le monde. En France, par exemple, le pays que nous connaissons le plus, ils sont en train de travailler sur des enrobées silencieuses et sur des enrobés traînants, ce que nous pourrions introduire chez nous.

L'entreprise étant passée par des phases difficiles, nous aurions voulu avoir des partenaires qui pourraient nous seconder d'une manière financière ou d'une manière qui ramènerait quelque chose soit matérielle. Nous sommes en train de travailler avec une entreprise italienne et nous avons contacté un certain nombre d'entreprises françaises lors du MEDEF, lors de la dernière visite de notre ministre à Paris. Et nous savons que les Français ont une autre approche de partenariat - ils veulent aller seuls sur le terrain, ils n'accrochent pas parce qu'il y a des problèmes internes que nous connaissons mieux qu'eux, et d'ailleurs il y a quelques projets sur lesquels ils ont soumissionné mais ils sont trop chers. Les quelques cas de tentative de partenariat qu'ils ont voulu faire, j'ai l'impression que c'est beaucoup plus un concubinage transitoire pour passer le cap de leur interrelation en Algérie.

Quelles sont vos grandes opportunités d'investissements et de partenariat ?

L'opportunité la plus importante et la plus saillante aujourd'hui est celle de l'autoroute est-ouest. L'Algérie veut réaliser cette autoroute coûte que coûte, mais elle n'a pas les moyens de le faire et notre gouvernement a dit qu'il ne mettrait pas la main à la poche. Nous avons dit que cela ne peut pas marcher ; il faut que le gouvernement mette la main à la poche, il n'y a pas d'autre solution, et je crois que dans ce cadre-là beaucoup de travail reste à faire. Sur 1.200 km, il y a 110 à 120 km qui sont réalisés. Le plus gros reste à faire.

Dans ce cadre-là je pense que les partenariats peuvent être montés, mais la formule est à voir en fonction de chacun parce que les projets risquent d'être financés par des institutions internationales. Je crois que les partenaires ne viendront en Algérie que lorsque les projets seront financés parce qu'ils seront garantis au moins pour le paiement.

Nous avons essayé de faire des efforts d'exportations vers le Mali, le Niger, la Mauritanie, le Burkina Faso, mais nous aussi avons voulu y aller que lorsque les projets étaient financés par les institutions internationales. L'autofinancement des pays est quelquefois aléatoire et on risque de buter sur des problèmes de paiement. Donc, je pense que c'est un peu le même raisonnement pour les entreprises étrangères qui veulent venir en Algérie.

Etant donné que vous êtes le P-DG d'une société de construction, quelle est la confiance personnelle que vous portez dans l'avenir de l'Algérie ?

Je passerai pas par quatre chemins, pour ne pas dire des routes ! On se demande si le réseau routier en Algérie est comparable aux réseaux qui se font en France, en Allemagne et en Italie.

Sachant pertinemment que l'Algérie fait cinq fois la France en superficie, nous n'avons pas l'intention de faire les autoroutes uniquement pour le Sud algérien mais il y a énormément de travail qui reste à faire. Je crois qu'en matière de réalisation il y a de quoi faire travailler une trentaine d'entreprises algériennes si tous les programmes venaient à naître et si les moyens de l'Algérie pouvaient se mettre en œuvre pour pouvoir réaliser ces infrastructures.

L'infrastructure routière étant une des voies de développement de tous les autres secteurs, je crois qu'il y a un retard. Nous sommes en avance par rapport d'un certain nombre de pays en Afrique - il faut regarder dans le rétroviseur aussi. Nous sommes bons, mais je crois qu'il y a énormément de choses à faire. Je suis très confiant quant au futur en matière de travaux publics, évidemment pourvu que l'Etat comme il l'a fait cette année met en place des projets concrets.

Quelle est votre plus grande satisfaction personnelle depuis que vous êtes à la tête de Sonatro?

Je suis à la Sonatro depuis 24 ans et j'ai pris la tête de l'entreprise en 1995. En cette année-là, l'entreprise était un peu malade. Donc la première satisfaction est de voir que cette entreprise est en train de sortir la tête de l'eau d'une part, de pouvoir participer un peu à l'effort national pour maintenir l'emploi quoiqu'en ma qualité de gestionnaire je peux vous dire que l'emploi ce n'est pas mon affaire, je veux uniquement que les gens qui travaillent ; nous avons fait un effort pour assainir nos effectifs mais nous avons gardé 2.500 emplois et par les temps qui courent, c'est énorme.

Ma satisfaction est aussi d'être à la tête de cette entreprise où j'ai fait mes premiers pas. J'ai œuvré à la Sonatrach, à la Sonacome, et à la SNVI. Mais disons que notre équipe fait tourner la boîte tant bien que mal malgré tout ce qu'on a passé comme difficultés.

Quel est donc le secret de votre propre style de management ?

Vous savez, je crois que c'est une main de fer dans un gant de velours. Pourquoi ? Parce qu'il est plus difficile de gérer des collègues et des amis avec lesquels vous avez travaillé pendant 20 ans ! Quelquefois, je dis à mes collègues lorsque l'on pique des crises, que si il y avait quelqu'un d'autre à ma place, vous seriez tous dehors. Mais, l'avantage que j'ai est que je connaissais les gens, je connaissais ceux qui étaient sous-utilisés, ceux qui avaient la tête ailleurs, les gens me connaissent aussi dans l'entreprise, et il faut dire quand même qu'il a fallu un an et demi pour canaliser tout cela. Cela n'a pas été facile. Il a fallu faire comprendre aux gens qu'il fallait retrousser les manches et prendre à bras le corps toute cette entreprise.

Je pense qu'il fallait donner la chance aux gens qui sont ici, mais aujourd'hui je crois que les compétences de l'entreprise sont épuisées. Il faut du sang nouveau maintenant et les gens le reconnaissent eux-mêmes. Depuis maintenant une année nous sommes en train de procéder à un recrutement qui n'est pas massif parce qu'on ne peut pas gérer de trop gros recrutements en même temps, mais en matière d'ingénieurs nous les envoyons directement sur les chantiers, car il n'est pas question qu'un ingénieur passe par les bureaux, il faut absolument que tout le monde passe par le chantier.

Donc forts de cette expérience, toutes les nouvelles recrues passeront obligatoirement par les chantiers pour que plus tard ils puissent revenir vers les sièges. C'est le même cas pour ceux qui sont dans les spécialités de comptabilité, des finances et ressources humaines.

Quel serait donc votre message final pour nos lecteurs ?

L'Algérie a des potentialités extraordinaires. Nous traversons encore des moments difficiles mais ce qui est certain, c'est qu'en Algérie il y a des cadres qui sont compétents, des cadres attentifs, qui veulent faire un peu plus sur le plan du volume et de qualité, et nous attendons d'éventuels investisseurs ou des étrangers d'une manière générale.

Il y a des choses à faire et nous pouvons même faire des choses ailleurs. J'ai proposé à des entreprises italiennes d'aller travailler ensemble au Mali, car que nous avons l'intention d'exporter, et nous le ferons.
Nous n'avons pas la prétention de dire que nous ferons des autoroutes en Allemagne mais nous essayons de voir ce qui se passe ici à côté au Mali, en Mauritanie, au Burkina Faso, au Tchad, au Niger, au Nigeria… nous sommes capables de faire des choses mais nous n'avons pas les capacités d'exporter. Nous avons quelque chose à vendre, mais nous ne savons pas le vendre. Donc si nous pouvions faire appel aux gens qui savent vendre et que l'on puisse se vendre ensemble ce ne serait pas une mauvaise chose.





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© World INvestment NEws, 2001.
This is the electronic edition of the special country report on Algeria published in Forbes Global Magazine. 12th November, 2001 Issue.
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