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December 4th, 2002




 Algeria
The time is now, the place is Algeria


V.I.P. INTERVIEWS

Dr. Said Barkat, Ministre de l'Agriculture



Ministère de l'Agriculture

Interview du

Dr. Said Barkat,
MINISTRE, et Président du Conseil Executif de l'Organisation Arabe de Développement Arabe Agricole

Alger, le 13 mai 2001
En juillet 2000 le PNDA - le Plan national de développement agricole - a été instauré, et maintenant qu'il est en place depuis pratiquement un an, quel est votre bilan de la situation et de votre succès jusqu'à maintenant ?

Il est encore tôt pour parler immédiatement de succès, donc je préfère parler d'évaluation et je dirais que le fondement du PNDA serait avant tout de restaurer l'agriculture dans l'économie nationale, ce qui n'était pas apparemment le cas il y a quelques années.

Donc il fallait donner une dimension économique à l'agriculture et sa place dans les secteurs économiques. A partir de là il fallait donc repenser l'agriculture. Comment la repenser ? L'agriculture servirait bien sûr à nourrir les bouches que nous avons - nous en avons 30 millions à nourrir - et aussi générer la richesse. Ceci implique mettre à la disposition des populations l'alimentation la plus saine possible, à des prix les plus abordables en quantité et en qualité. Pour ce faire, il faut tout d'abord produire chez nous, et pour produire, il faut préserver les outils de production qui sont notamment:

· Avoir la surface agricole utile qu'il faut préserver et l'utiliser d'une façon rationnelle, l'utilisation rationnelle de la surface agricole utile ;

· Nous sommes un pays aride et le peu de pluie que nous avons doit être utilisées de façon rationnelle pour les utiliser à fond. C'est un outil de travail, donc c'est l'utilisation rationnelle de l'eau ;

· Ensuite il faudrait que nous utilisions d'une façon rationnelle cette armée de jeunes que nous avons, notamment les intellectuels. Je voudrais qu'ils rêvent bien chez eux, car ils ont le droit de rêver, et ils ont le droit de réussir. Leur force et leur génie, c'est très important pour le pays. Dans l'Agriculture, c'est possible de réussir maintenant en Algérie, et il est possible de devenir riche en exerçant n'importe quelle activité dans l'agriculture.

· Nous devons aussi orienter les investisseurs, quelles que soient leur taille et leur capacité d'investissement vers des activités réellement rentables. Toutes les actions dans le cadre du PNDA permettent de générer le produit et sont basés sur préservation de la nature. Elles doivent toutes être écologiquement durables, économiquement rentables et socialement acceptables, ce qui permet à la fois de lutter contre la désertification, contre la pollution et surtout préserver l'outil de production de travail.

Ceci dit, avec cela, nous devons produire. Mais produire quoi et pour qui ? Produire tout d'abord de bonne qualité et en quantité, et produire Bio. Nous avons la chance en Algérie d'avoir une agriculture qui est déjà en bonne partie Bio que nous allons améliorer, donc nous devons nous adosser sur les Instituts et le savoir-faire, qu'il soit national ou international.

Nous avons donc commencé à initier les opérateurs économiques de base vers l'agriculture Bio. L'agriculture traditionnelle est déjà Bio, alors en allant vers une production suffisante mais en restant Bio, ceci permettra tout d'abord à nos populations de consommer une alimentation saine et aussi de pouvoir exporter vers les pays qui sont versés vers l'agriculture conventionnelle où il y a une sur-utilisation des produits chimiques et les engrais. Donc, c'est aussi une façon d'assurer un marché au niveau international. Nous produisons Bio pour nos populations et nous produisons pour l'exportation, ce qui permet d'importer ce que l'on ne peut pas produire chez nous.

Cette balance agricole permet la sécurité alimentaire à partir de l'agriculture, puisque l'agriculture est devenue maintenant un succès attrayant pour nos jeunes, notamment nos jeunes cadres, ainsi que pour tous les investisseurs, que ce soit dans la mise en valeur ou dans les activités de services ou également dans les activités de transformation.

Vous avez dit l'année dernière que votre défi était de changer les mentalités. Avez-vous atteint ce but ?
Depuis le lancement du PNDA en 2000, il y a 90.000 exploitations qui sont venues adhérer et plus de 50 % ont déjà bénéficié du soutient et du financement de leurs opérations programmées. Nous avons réalisé plus de 250.000 hectares mis en valeur, et sur les nouvelles terres que nous avons développé, nous avons préservé au moins 500.000 hectares pour la désertification en quelques mois, donc nous avons réoccupé et restauré le terrain en évitant certaines zones qui étaient fragiles et qui étaient sur le point de se désertifier.


Changer de mentalités, culturellement et du point de vue alimentaire, les pays du Maghreb sont versés dans les pâtes et notamment les céréales (blé, pain, etc). Les pays arides n'ont pas vocation à produire du blé, sauf dans certaines régions où il y a une bonne pluviométrie. Nous avons quelques régions au Nord et à l'Est du pays, et au Grand Sud nous avons une irrigation pour produire du blé. Pour le reste du pays il fallait changer l'approche car l'agriculteur ne pouvait pas concevoir autre chose que le blé ou les légumes, qui demandent quand même beaucoup l'eau, et labourer avec moins de 300 mm de pluviométrie en allant vers l'arboriculture rustique qui consomme moins d'eau, qui permet d'avoir un revenu conséquent et qui permet de préserver le sol.

Ceci dit, nous allons adopter les cultures agricoles aux régions, aux bassins et aux données naturelles tout en préservant le sol, tout en donnant une chance à l'agriculteur et opérateur économique de base à bien gagner sa vie.

Quant à l'approche pour une première année, elle a été suivie par de nouvelles exploitations et nous avons presque 10 % du patrimoine du verger et arbres fruitiers qui ont été renouvelés cette année, ce qui illustre les débuts de succès pour notre approche de reconversion.

Quels sont les investissements qu'il faut faire dans le secteur pour le développer d'avantage ? Vous aviez établi un but de 25 % d'investissement de la valeur de production agricole en 2010, donc est-ce que vous êtes justement en train d'augmenter ces investissements dans les années qui viennent ?

Le soutien à l'agriculture est encore faible chez nous, en comparaison aux pays d'Europe où cela dépasse les 50 % des produits de l'agriculture. Il est certain que les décideurs en Algérie ont pris conscience de cette faiblesse en l'agriculture, et nous venons d'avoir une première enveloppe du budget réservée à la relance. Nous avons obtenu la plus grosse enveloppe, ce qui dénote qu'il y a une très forte volonté de relancer l'agriculture et de la mettre sur la bonne voie, puisqu'elle est créatrice d'emplois et de richesse.
Cette enveloppe et le PNDA ouvre toute une panoplie et tout un spectre de créneaux où nous pouvons nous lancer dans l'investissement de tous genres, d'un petit atelier de découpe de dinde jusqu'à l'unité de transformation, de fabrication de l'aliment de bétail jusqu'aux grosses unités de transformation ou d'unités de lait, d'huile, etc. Tout cela va suivre jusqu'à la production de machines agricoles, maintenance et activités de services. Déjà, il y a à peu près 8.000 entreprises qui ont adhéré et qui ont commencé à activer les agriculteurs, ce qui n'était pas le cas il y a quelques mois.

Donc, reste ensuite l'investissement. J'appelle les étrangers qui sont intéressés soit en investissement direct, soit en partenariat avec les Algériens, surtout lorsqu'ils veulent produire chez nous. Nous avons un pays qui a 80 % de serres naturelles. Nous n'avons pas besoin de chauffer. Nous avons de l'eau, des surfaces prêtes à être cédées, des périmètres énormes où les modules se comptent par milliers d'hectares, et nos aéroports se comptent par dizaines avec 100.000 kilomètres de routes. Il n'y a pas un seul village qui ne soit pas électrifié, car nous sommes à presque 97% d'électrification du pays. Donc nous pouvons réellement investir, nous pouvons produire Bio hors-saison, produire en quantité et avoir les moyens de transports très rapidement. Je peux vous citer Adrar, Biskra, ou n'importe quelle autre ville de l'intérieur et dans le Sud, où vous avez l'aéroport, le chemin de fer, la route, le téléphone, le fax, le gaz, l'électricité et le soleil. Vous n'avez pas besoin de chauffer vos serres. Donc l'investissement est le bienvenu, notamment dans la production.

Je vous dirais que nous importons à 100 % notre sucre, mais nous voudrions en produire chez nous. Pour les personnes qui sont intéressées, nous leur donnons les terres pour produire la betterave à sucre, pour produire la transformation, au lieu de l'importer. Nous importons aussi l'huile à 100 %, ce que nous voudrions produire chez nous également. Voilà des créneaux qui sont très importants. Pour le lait, nous l'importons à 60 %, et chaque matin sur nos 30 millions d'habitants, il y a 18 millions d'algériens qui attendent leur lait, donc vous pouvez constater l'immensité du marché local.

Ce qui est de plus, avec l'arboriculture qui s'installe, les vignobles qui reprennent, les créneaux d'investissements et la transformation de produits de fruits est un marché énorme qui s'ouvre pour les investisseurs.

Comme vous l'avez dit, il s'agit non seulement de produire mais il s'agit aussi de vendre les produits à l'étranger. Donc quelle est la stratégie du ministère pour développer vos relations internationales ?

La première stratégie est que nous devrions produire beaucoup pour que les prix baissent chez nous, car nous allons travailler dans le sens où nous devrions baisser les coûts de production, donc les produits seront très disponibles et à des prix très compétitifs.

Deuxièmement, les Algériens ont oublié comment exporter et comment vendre le produit agricole puisqu'il n'y avait pas beaucoup de produits agricoles à part le vin et les dattes pour l'exportation. Nous sommes en train de replanter des vignes, et nous avons les meilleures dattes du monde mais nous ne savons pas encore les vendre - nous passons toujours par une ou deux villes d'Europe et ça s'arrête là. Plusieurs opérateurs internationaux pourraient venir accompagner les Algériens, soit en partenariat, soit directement pour acheter algérien. Effectivement, certains produits sont disponibles telles que la tomate et les pommes de terre Bio, en plus du vin et des dattes.

Je pense que les personnes qui connaissent bien le marché international trouveront de bonnes affaires en Algérie, ensemble avec des Algériens capables de les accompagner

L'année dernière l'agriculture représentait 12 % du PIB. Si l'on parle de l'avenir du secteur, quelle serait votre vision de sa croissance pour les années à venir ? Quelle position pensez-vous qu'aura le secteur agricole dans le pays ?

Si le secteur agricole dépasse 18 % du PIB, l'économie devient fragile, donc même si nous sommes rigoureux, il y a la nature qu'il faut maîtriser. Il vaut mieux de viser un PIB moyen, aux environs des 15%, car ce n'est pas le pourcentage qui augmentera, c'est le PIB.

Vous êtes Ministre de l'Agriculture depuis décembre 1999 - comment était l'expérience pour vous et un de vos plus grands défis?

Je suis arrivé dans une administration que géraient le Ministère d'une façon administrative et très bureaucratique, avec moins de rigueur dans la perception et l'analyse des choses. Il fallait donc moins d'administration et de politique dans l'agriculture et instaurer une administration plus simple et rigoureuse.

Mon souhait le plus fort est qu'il n'y ait pas d'enfants qui souffrent de faim, que ce soit en Algérie ou ailleurs. Ceci est mon souhait le plus cher.





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© World INvestment NEws, 2001.
This is the electronic edition of the special country report on Algeria published in Forbes Global Magazine. 12th November, 2001 Issue.
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