Vous avez ouvert
très récemment. Etant donné
qu'il y a déjà un Novotel et deux
Ibis à Prague, quelle était la motivation
pour Accor d'ouvrir un hôtel Mercure ?
Il y avait plusieurs raisons. Accor a débuté
ici avec un hôtel Ibis à Karlín
qui était fermé à cause des
inondations mais qui vient aujourd´hui de
réouvrir. Après cet Ibis-là,
nous avons développé Novotel et ouvert
un autre Ibis dans Prague 2. Ce projet ainsi que
l'Ibis de Karlín ont eu un succès
financier assez réconfortant, et c´est
à partir de ce moment que Prague est devenu
une ville prioritaire pour le développement
de notre groupe. Nous avons alors décidé
d'ouvrir un autre Mercure. Pourquoi Mercure? Parce
que Mercure est un réseau européen,
en général présent dans chaque
capitale avec plusieurs hôtels. Et de plus,
nous venons de reclasser nos hôtels Mercure
avec un nouveau système de classement - 2M,
3M, et 4M. Ici nous sommes 4M, c´est à
dire le niveau le plus luxueux de la marque. Pourquoi
avons-nous choisi Prague? Parce que non seulement
c'est un succès financier, mais aussi parce
que la demande est là, et donc il y a un
vrai besoin d'hôtels comme les nôtres.
Environ 60-65 % des clients de notre réseau
Mercure sont des voyageurs d´affaires. Ici
c´est un peu moins que cela. Nous avons déjà
récupéré des contrats de corporations
présentes sur ce marché et des réservations
à travers du 'Global Distribution System'
et d'internet qui ne cesse pas d'augmenter. L'avantage
que nous avons c´est d'être une chaîne
de marque connue qui offre une sécurité
de séjour au niveau de la qualité
des chambres, de la sécurité et de
la qualité de nos produits; mais en même
temps nous restons indépendants dans la mesure
ou ces hôtels sont toujours bien intégrés
dans l´environnement. Je ne sais pas comment
vous vous sentez ici, mais moi je me sens dans un
hôtel à Prague, pas à Londres,
pas à Paris ou à New York, mais à
Prague. Ce qui n´est pas forcément
le cas dans tous les autres hôtels de Prague.
Ce dont on parle beaucoup en ce moment, c´est
que des villes comme Prague ont récuperé
beaucoup de voyageurs qui voyageaient en Tunisie,
au Maroc. Depuis le 11 septembre, ces voyageurs
se sont tournés vers des destinations telles
qu'Amsterdam et Prague. Comment ressentez-vous cet
effet?
Je parle un petit peu en deuxième ligne parce
que je n´étais pas là le 11
septembre, ni pendant les mois qui ont suivi la
crise, mais je ne pense pas que Prague ait profité
du 11 septembre. Prague, comme chaque autre ville
du monde, a fait son bilan de conséquences
du 11-09. C´était un choc, et pas seulement
pour l'Amérique, où les voyages ont
fortement diminué. Au niveau européen,
les effets ont été beaucoup moins
visibles, mais au moins on a fait le bilan des conséquences
de ce désastre. Maintenant est-ce qu´il
y a un 'shiftage' des destinations ? Oui, je pense
qu'il y a un 'shiftage' des destinations. Peut-être
est-ce des longs séjours qui ont été
raccourcis, mais est-ce que la vrai raison derrière
cela est le 11 septembre; où est-ce que c´est
peut-être dû au fait que nous sommes
en train de subir une petite régression économique?
En regardant plus proche de chez nous, Prague
a beaucoup souffert des inondations de l'été
dernier. Comment voyez-vous l´effet de ces
inondations sur le secteur hôtelier; à
la fois à court-terme et à long terme?
Je peux vous confirmer l´effet à court-terme
comme toutes les télévisions du monde
qui ont retransmis les événements.
Prague a été sinistrée avec
un soi-disant retour de maladies incroyables, qui
n´existaient plus depuis longtemps. Aujourd´hui
heureusement on commence à se rendre compte
que les conséquences n'étaient pas
aussi graves que l'on pensait, des parties de la
ville ont été inondées, c'est
un fait, mais il y en a eu d´autres, comme
Dresde etc. Cela a quand même eu un effet
important sur notre secteur. Nous avons eu énormement
d'annulations, surtout au niveau des loisirs. En
plus, le monde des affaires a été
perturbé, des quartiers étaient complétement
fermés. Notamment le quartier de Karlín,
Prague 8, qui était, jusqu'à fin décembre,
un quartier en plein essor. Nous avons réussi
à couvrir les coûts, mais cela fait
mal. Je pense que chaque hôtelier vous dira
la même chose. Nous avons déjà
rattrapé nos pertes, ce qui nous permet de
faire d'autres choses. Ce n´est pas pour rien
d´ailleurs que les hôteliers ont pris
l'initiative " Prague is cooking " sur
le pont Charles. Nous avons rassemblé 800
personnes, et distribué la soupe pragoise
(traditionellement servie dans une miche de pain
après en avoir enlevé la mie) pour
démontrer aux média que Prague est
redevenue plus au moins comme avant. Aujourd´hui
je pense que la vie à Prague est revenue
à la normale mais il faut beaucoup d´efforts
pour diffuser ce message. Je n´estime pas
que nous allons recupérer ces voyageurs avant
avril l´année prochaine.
Quel est le taux d´occupation que vous
prévoyez pour votre hôtel ici sur un
plan annuel?
C´est un hôtel qui débute, donc
nous estimons avoir l´année prochaine
environ 70 % de taux d'occupation.
Travaillez-vous sur beaucoup de services annexes
pour augmenter vos REV- PAR (Revenu par Chambre
Construite)?
Oui, bien sûr, je travaille sur des services
annexes, mais pas seulement pour obtenir un résultat
financier. Avant tout je suis hôtelier. C´est
mon métier, ma passion, et travailler sur
d'autres services, c´est plutôt mon
hobby. Je veux offrir à mes clients un service
absolument parfait, un bon repas chez nous dans
une brasserie française qui s´appelle
Félice, avec une cuisine authentique. Je
veux que ce bar devienne un lieu où tous
les hommes d´affaires praguois, nationaux
et internationaux se rencontrent. Ce sont des choses
qui sont importantes, qui influent aussi sur les
REV-PAR. Je veux créer des points de ventes
pour les hommes et femmes d´affaires tchèques
qui, le soir, peuvent revenir avec leur famille
pour un petit dîner sympathique. Je pense
qu´au niveau de la restauration, c´est
le début. Je refuse de faire des points de
restauration seulement pour les clients de l´hôtel.
Ce n'est pas gai, et en général ce
n´est jamais un succès financier. Donc
les succès financiers au niveau de la restauration
sont faits à travers de leur propre produit,
avec leur propre marché. Maintenant en ce
qui concerne les REV-PAR, il faut les augmenter
bien sûr. Comment ? Il faut augmenter le taux
d'occupation ou le prix moyen, ou encore mieux les
deux. |
Aujourd´hui on
se retrouve dans une situation financière
européenne qui n´est pas très
bonne. Prague ne va pas être une exception.
On a une baisse d´activité au niveau
des loisirs parce que Prague devient tout doucement
un petit peu cher, les prix des billets d'avions
le sont déjà. On fait Paris - Prague
pour le weekend pour 300 euros. Plus le prix du
séjour ici, qui est assez cher en comparaison
avec d'autres villes comme Barcelone ou Istambul.
C´est là où il faut se poser
la question: comment se positionner sur le plan
des loisirs au niveau international ? Je suis convaincu
que le fait que la république tchèque
réjoigne la Communauté Européenne
aura un effet positif sur l´économie,
parce que nous sommes ici dans un pays en pleine
voie de développement. Les hommes d'affaires
viendront de plus en plus. Cela aura sûrement
un effet très positif. Et je suis content
que le sommet de l'OTAN se soit bien passé,
et aura un effet positif sur le segment des congrès;
pour justement mieux positionner Prague sur la carte
internationale.
Quel va être le climat de compétition
dans Prague ? Il y a quand même une bonne
sélection d´hôtels de 3, 4 étoiles
au centre ville. Comment vous positionnez-vous par
rapport aux autres hôtels, comment vous differenciez-vous
de vos concurrents?
Disons qu´il y a beaucoup d´hôtels
5 étoiles - Renaissance, Marriott, Hilton,
Pari, Bohemia
sur un rayon de 200 mètres
c´est beaucoup. Il n´y a pas beaucoup
de 4 étoiles. Nous avons ici le Novotel,
K&K , le Phénix et nous. Le fait que
nous ayons un vrai produit 4 étoiles est
un premier positionnement. Le deuxième, c´est
le prix. Nous avons aujourd´hui un prix en
dessous de celui des autres hôtels qui nous
entourent. Le troisième point est notre localisation;
le quatrième, l´image de marque de
Mercure, et la sécurité de ces prestations,
qui respectent l´intégration sur le
plan local. Ces quatre points seront la base de
notre succès.
ACCOR, premier groupe hôtelier européen,
est un groupe français. Comment jouez vous
de cette image française?
Oui, bien sûr, nous sommes une société
française et cela se ressent à tous
les niveaux. Au niveau de la restauration aussi.
'Félice' est une brasserie où nous
essayons de cuisiner les plats d´une vraie
brasserie parisienne. C´est vraiment dans
le style français; à travers de notre
carte de vins nous avons mis en place un programme
de la marque Mercure qui s´appelle 'Grands
Vins Mercure'. Nous achetons de grandes cuvées
pour des prix très raisonnables. Nous n'allons
pas tout de suite acheter du Château Margot
parce que c´est quand même un peu cher,
et puis ils n'ont pas assez de production. Mais
nous achetons volontiers un Bordeaux grand cru à
un prix abordable et d'une grande qualité.
Nous achetons cela pour nos hôtels Mercure
et nous avons une politique de vente attirante parce
que nous appliquons une marge maximale de 15 %,
avec un prix maximum de 10 euros. Ce n´est
rien du tout comparé aux prix de la concurrence.
C´est un programme de marketing qui s'est
mis en place il y a une vingtaine d'années
dans tous nos hôtels Mercure. Cela a tellement
évolué que maintenant nous n'avons
pas seulement une carte mondiale; en France nous
avons deux cartes - nord et sud, printemps et hiver,
pour la simple raison que la production n´était
plus suffisante. Nous avons aussi une carte au Luxembourg,
en Allemagne, en Autriche, en Australie, Angleterre,
Italie, Espagne, et cette année pour la première
fois ici, en République Tchèque. Normalement
des pays producteurs de vins, comme par exemple
l'Italie, ont leur propre carte avec des vins de
leur pays en exclusivité. En République
Tchèque, il y a des vins locaux, mais ils
ne sont malheureusement pas encore tous à
un haut niveau de qualité. Nous en avons
identifié trois, et nous avons d´autres
'Grands Vins Mercure' français, allemands
et autrichiens.
Une chose qui intéresse toujours nos lecteurs,
c´est de savoir comment les gens que nous
rencontrons arrivent à leur position. Vous
êtes aujourd'hui le manager d´un Mercure
à Prague, comment êtes-vous arrivé
jusque-là ?
Disons que je suis né il y a 38 ans aux Pays-bas,
ou j´ai fait mes études à l´école
hôtelière. Ensuite, je suis allé
faire mon stage pratique en Côte d´Ivoire
chez Intercontinental. Après cela j´ai
débuté au Pays-Bas au Hilton, à
Rotterdam, Amsterdam, Paris, Madagascar, un petit
passage à travers Jakarta, et par la suite
j´étais au Yémen et après
tout cela, je suis rentré dans le groupe
Accor. Il y a plusieurs choses qui m´ont passionné
chez Accor. Premièrement, c´est le
directeur de l´époque, Ralph Radtke,
qui m´a donné une interview. C'était
un homme tellement amoureux et passionné
par son métier; il m´a donné
une image tellement forte que je n´avais pas
encore vu dans le monde anglo-saxon. Il avait beaucoup
d'enthousiasme pour le groupe. Deuxièmement,
l´autonomie qu´on reçoit chez
le groupe Accor est aussi une chose qu´on
ne trouve pas facilement chez les groupes anglo-saxons.
On y trouve plutôt une bibliothèque,
sauf qu´elle n´est pas rempli de bouquins
mais de " manuels ". Il faut les respecter.
Chez Accor nous avons un minimum de standards auquels
il faut adhérer. Mais cette autonomie nous
permet de prendre beaucoup d´initiatives,
on peut créer sa propre formule de bar, de
restaurant, le choix des repas, on peut prendre
de vrais décisions d´une façon
assez autonome. Cela ne veut pas dire que c´est
l´anarchie. En même temps nous sommes
responsables de toutes nos actions. J´ai beaucoup
aimé cela il y a 8 ans environ, quand je
suis rentré dans le groupe comme F&B
manager sur Sofitel et Novotel au Luxembourg. Maintenant
je suis un hôtelier en plein centre-ville
à Prague, et je me réjouis toujours
d'être au sein du groupe leader européen.
Quel serait votre message final pour nos lecteurs?
Premièrement, venez dormir chez Mercure et
découvrir la passion du métier de
nos hôteliers. Deuxièmement, je pense
que la république tchèque est un pays
qui présente énormément d´opportunités
pour les investisseurs. La ville de Prague en particulier
offre une qualité de vie qui est comparable
avec n´importe quelle autre ville d´Europe
de l´Ouest. Il est intéressant d'investir
ici également parce que l´emploi ne
coûte pas aussi cher qu'à l´Ouest.
Il y a un gouvernement très stable, un progrès
économique constant, qui varie de 3 à
5 % ce qui n´est pas forcément le cas
dans d'autres pays. Les données financières
sont très motivantes pour venir ici. Ce n´est
pas pour rien que nous y sommes aussi ! |