Pourriez vous nous
présenter la BGFI et son implantation au
Congo ?
Tout d'abord, nous sommes une banque gabonaise.
Nous avons ouvert nos portes au Congo le 3 avril
2000. Au Gabon nous sommes la première institution
financière, et je peux même préciser
que nous sommes la première banque de la
sous-région, de l'Afrique Centrale, et la
quatrième banque de la zone franc de l'Afrique
francophone. J'anticipe car les chiffres n'ont pas
encore été approuvés par les
commissaires aux comptes, mais pour l'exercice 2001
nous devrions réaliser un résultat
net après impôts de 8,6 milliards de
CFA. L'année dernière nous avons augmenté
notre capital pour le porter à 24 milliards
de CFA. Dans la sous région nous avons très
peu de concurrents. Outre l'activité purement
bancaire sous le label BGFI Bank, nous sommes un
groupe financier, qui fait du crédit bail
avec BGFI Bail, de l'ingénierie financière
et du conseil avec BGFI Participation, et également
du crédit à la consommation avec une
structure qui s'appelle Finatra. Nous avons une
structure de crédit à la consommation
en plus de notre structure bancaire car notre banque
a une clientèle assez ciblée. Nous
sommes la première banque de la sous-région,
mais nous avons trié notre clientèle.
Nous existons depuis 1971, et pendant de très
nombreuses années nous étions une
filiale du groupe Paribas. Jusqu'en 1997 nous nous
appelions Paribas Gabon. Paribas était d'abord
connu pour son métier de banque d'affaires,
et donc en tant que filiale nous avions emboîté
le pas de la maison mère, et nous faisions
essentiellement de la banque d'affaires. Petit à
petit nos métiers se sont diversifiés,
mais nous avons quand même gardé cette
fibre de clientèle ciblée, même
après le départ de Paribas du Gabon.
Nous avons diversifié nos métiers
et aujourd'hui nous sommes une banque avec une stratégie
globale, même si notre portefeuille reste
haut de gamme, c'est à dire des entreprises
et des particuliers avec des revenus élevés.
Nous ne sommes pas une banque de détail,
sans être péjoratif.
Qu'est ce qui a motivé votre venue au Congo
?
Le potentiel de développement évidemment.
Un pays qui sort d'une situation délicate,
un pays où tout est à reconstruire,
et de plus vous n'êtes pas sans connaître
les liens particuliers qui unissent les deux pays.
C'était donc l'occasion pour nous de participer
à la reconstruction. Depuis deux ans maintenant,
la reconstruction n'a pas été aussi
rapide que prévue. Il a fallu remettre en
place les administrations, il a aussi fallu créer
une assise politique et organiser des élections
; la reconstruction réelle démarrera
donc probablement en septembre. Nous sommes peut
être arrivé un peu tôt, mais
cela n'est pas plus mal car nous avons pu nous implanter
rapidement et gagner notre part de marché.
Dès 2001 nous avons ouvert l'agence sur Pointe
Noire, et à présent nous fonctionnons
sur ces deux structures.
Quel état des lieux dressez-vous du secteur
après les efforts d'assainissement?
Depuis deux ans, le secteur a été
grandement restructuré. Il était complètement
sinistré ; il n'y avait qu'une banque qui
fonctionnait normalement, le CAIC, les deux autres
ayant perdu pratiquement toute leur clientèle,
ce qui a entraîné leur privatisation.
L'UCB a été reprise par la COFIPA,
et la BIDC par le Crédit Lyonnais. Nous sommes
donc arrivés sur un marché très
particulier où on n'avait pas de base de
travail. Si vous me demandez des chiffres quant
aux parts de marché, je vous mentirais en
vous donnant une réponse, car nous n'avons
pas de données significatives. De plus les
données sont faussées car 70% des
portefeuilles des banques étaient exsangues.
On ne peut pas vous donner de chiffres valables
actuellement. Globalement, le CAIC est la banque
leader car longtemps seule, nous venons en seconde
position car nous travaillons avec les gros clients
et l'état, la Cofipa arrive en troisième
et le Crédit Lyonnais a tout à construire.
Est-ce qu'on peut dire que le pays dispose d'un
cadre financier incitatif à l'investissement
?
Oui, le secteur bancaire est assaini, vous avez
trois banques privées, contrôlées
par la COBAC au niveau régional, les clients
ont donc à présent des garanties de
bon fonctionnement. L'urgence n'était pas
à la privatisation du CAIC, mais je pense
que le ministre a décidé de conclure
la privatisation du secteur. Nous avons un statut
particulier car nous sommes sous forme de succursale,
et donc nous bénéficions de toute
la logistique et de toute la trésorerie de
la maison mère au Gabon. Donc la BGFI Bank
au Congo ne représente pas un risque pour
les dépôts.
Quelle est la stratégie d'évolution
de la BGFI ?
Nous allons poursuivre la politique que nous avons
menée depuis que nous sommes installés
ici, c'est à dire cibler notre clientèle.
Nous allons ouvrir une deuxième structure
sur Brazzaville, car celle-ci est un peu petite
et vétuste, nous allons la garder comme agence
VIP et ouvrir une agence un peu plus commerciale
en ville.
L'ouverture du deuxième centre à Brazzaville
est prévue pour quand ?
Pour le deuxième semestre 2002, et puis avec
ces trois sites sur le Congo, je pense que nous
aurons atteint notre taille idéale. |
Pensez-vous que le
marché soit assez grand pour le nombre de
concurrents présents ?
Oui tout à fait, le marché est quand
même important, vous avez plus de deux millions
d'habitants au Congo. Pour Brazzaville, vous avez
également le marché de Kinshasa, qui
est une clientèle potentielle supplémentaire.
De plus, il y a la reconstruction à faire,
tout est à faire, les infrastructures sont
à installer, dans l'eau, le téléphone
bientôt. Oui, il y a beaucoup de potentiel
pour une institution financière !
Envisagez-vous une implantation en RDC ?
Directement là bas, non. Notre stratégie
est d'abord de bien cerner les pays de la zone CEMAC,
les six pays qui sont sous la tutelle de la BEAC.
Les pays voisins ne constituent pas encore une priorité,
même si Kinshasa représente un gros
potentiel, ce sont d'autres règles que nous
ne maîtrisons pas, alors nous voulons d'abord
nous renforcer dans la sous-région. Un de
nos objectifs à court terme, est d'avoir
une succursale sur Paris.
Quels sont pour vous les atouts de la BGFI par rapport
aux autres banques du marché ?
Tout d'abord, notre portefeuille étant moins
important, nous ne nous dispersons pas, et nous
pouvons rendre un service plus personnalisé.
Nous pouvons mieux gérer les besoins de nos
clients. On peut traiter les dossiers plus rapidement,
nous avons une vocation de banque de proximité.
Le second atout dont nous disposons, que le Crédit
Lyonnais va sûrement implanter également,
ce sont les outils de banques modernes. Les banques
en Afrique francophone ne disposent pas toutes du
SWIFT par exemple. Nous ne le faisons pas encore
sur le Congo, mais pour le Gabon par exemple nous
avons une scannerisation des signatures pour sécuriser
les transactions.
Quelle part représente le Congo pour la BGFI
dans le marché CEMAC?
Aujourd'hui, le Congo représente environ
10% de l'activité et nous tablons sur environ
30% d'ici deux ans. Cela devrait monter assez vite.
Quels sont les secteurs que vous considérez
comme prometteurs actuellement ?
Le secteur bois, le BTP, car toutes les infrastructures
sont à faire. En fait, je pense que le bois
a le plus fort potentiel. Pour le secteur pétrolier,
je dirais non, car en général les
sociétés pétrolières
n'ont pas besoin du concours des banques locales.
Ce n'est pas le secteur pétrolier qui va
nous pousser vers les performances et le chiffre
d'affaire. Pour ce secteur, nous agissons plus comme
des boîtes aux lettres. Tous leurs financements
se font sur les places financières internationales
en dollars et donc le franc CFA et les banques locales
ne les intéressent pas. La production d'électricité,
par contre aurait aussi besoin d'investissement.
Quelle a été la clé de la réussite
pour l'implantation de la BGFI au Congo ?
Déjà, le besoin d'une banque fiable
; car avec toutes les faillites bancaires qu'a connu
le pays les gens n'avaient plus confiance. Il fallait
une banque qui leur offre la sécurité.
Certains clients avaient perdu des sommes considérables.
Nous sommes arrivés en tant que succursale
d'une grande banque, et donc s'il y a un problème
dans le pays, les fonds seront disponibles à
l'étranger. Nos informations sont retraitées
sur le site central de Libreville. Ces atouts nous
ont permis de gagner la confiance des clients.
Avez vous repris la clientèle de l'ancienne
banque FIBA ?
Nous n'avons pas repris le portefeuille de la FIBA.
Cette banque a eu un passé spécial
et a été liquidée pour cela.
Nous avons repris les locaux, et nous avons un actionnaire
en commun, mais nous n'avons pas repris la FIBA.
Evidemment, une partie de la clientèle nous
a été recommandée, et donc
nous avons de nombreux clients qui sont venus naturellement
chez nous. Nous avons peut être récupéré
90% du portefeuille de la FIBA, mais nous ne l'avons
pas racheté. Les gens se sont présentés
et ont eu confiance en notre institution. Mais encore
une fois, nous n'avons aucun lien comptable ou juridique
avec la FIBA.
Quelle a été pour vous l'expérience
la plus marquante depuis votre implantation ?
Et bien justement la création de la banque.
Nous sommes arrivés avec un stylo et nous
avons créé la succursale de toutes
pièces. Faire de la banque, monter les dossiers
et faire de la finance représente le métier,
c'est la routine. Mais la création de la
banque, l'obtention des agréments, l'installation
du site, le câblage fait par nous même
à Brazzaville. Nous avons eu l'accord en
février 2000 et la FIBA devait fermer fin
mars. Donc nous n'avions qu'un mois pour assurer
la continuité. Nous avons dû relever
les manches et tout faire nous-mêmes, nuit
et jour, pour pouvoir ouvrir à l'échéance
prévue. Cela reste des souvenirs incroyables.
De plus c'était notre première implantation
à l'étranger, la deuxième fut
Malabo peu de temps après. Libreville suivait
nos progrès au jour le jour et s'inquiétait
d'un éventuel retard pour l'ouverture.
En ce qui concerne Pointe Noire, nous avons mis
quatre mois pour préparer le site, nous
avons bien fait les choses, en prenant le temps.
Quel message final adresseriez-vous aux investisseurs
?
Honnêtement, je ne pense pas qu'il y ait actuellement
beaucoup de pays qui soient dans le cas du Congo.
Il y a tout à faire, et le cadre juridique
et d'investissement est assez correct. Il y a vraiment
des affaires à saisir. Dans la sous-région
je vois le Congo et l'Angola qui sont dans la même
situation à peu près. Quel que soit
le secteur, les investisseurs doivent vraiment prêter
attention à ce qu'il se passe ici. Ce pays
connaîtra ses années de prospérité,
une fois les problèmes sociaux résolus
bien sûr.
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