L'axe port - rail - fleuve
pour une vocation de transit
De par sa situation géographique privilégiée,
le Congo-Brazzaville est considéré
comme un pays de transit par ses voisins : le
Tchad, la République Centre Africaine,
le Cameroun, le Gabon et la République
Démocratique de Congo. Mais, le manque
de développement de ses infrastructures
de communication et les crises socio-politiques
qui ont ébranlé le pays, ont fini
par empêcher le Congo de jouer son rôle
de pays de transit. Aujourd'hui, il entend reconquérir
cette vocation.
La
porte océane de l'Afrique Centrale
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Le Port Autonome de Pointe Noire est le plus grand
de la sous-région ; il jouit d'une situation
géographique idéale. Avec son accès
direct sur la mer et ses 2.135 mètres de
quais en eaux profondes, il peut aisément
accueillir des bateaux de lourds tonnages, contrairement
aux ports d'estuaires des pays voisins. " Le
port de Pointe Noire est idéalement placé,
à la croisée des grandes routes maritimes
et à l'entrée d'un vaste interland
de 4 millions de Km2 et de plus de 100 millions
d'habitants. ", affirme Jean-Marie
Aniele, directeur général du Port
Autonome de Pointe Noire.
La ville de Pointe Noire apparaît donc comme
un grand entrepôt, avec un port d'éclatement
à partir duquel peuvent être desservis
les pays voisins du Congo. Elle est appelée
à ce titre : " la porte océane
" de l'Afrique Centrale
Le port voit passer la quasi-totalité du
trafic commercial national. En 2001, quelques 714.600
tonnes de marchandises y ont été débarquées,
dont 117.165 tonnes en transit. 11.528.632 tonnes
ont été exportées au départ
du port. Ce dernier tonnage est essentiellement
constitué par le pétrole brut et le
bois. L'activité de transit, d'acconage,
de consignation, de manutention et d'armement est
en pleine effervescence. En témoigne l'essor
de nombreuses sociétés internationales
et nationales, telles MAERSK, PANALPINA, GETMA,
SOCOTRANS, SOCOTRAM et TRANSCO MARITIME.
Les récents travaux de désensablement
ont permis au port de retrouver ses capacités
d'accueil optimales. Par ailleurs, tout est mis
en uvre pour faciliter la venue d'investisseurs.
Anciennement partie de l'Agence Transcongolaise
de Communication (ATC), une structure entièrement
étatique, le port est maintenant autonome
et irrémédiablement engagé
sur la voie de la libéralisation. "
Ce sont les investisseurs qui font aujourd'hui le
développement du port ", affirme
Jean-Marie Aniele. Les procédures administratives
et douanières sont quant à elles en
passe d'être simplifiées, notamment
avec la volonté de création d'un Guichet
Unique et d'une zone franche.
Malgré tous ces efforts, le port de Pointe
Noire n'enregistre pas encore un rendement optimal.
Le mauvais fonctionnement du chemin de fer en est
la principale explication. Il constitue un goulot
d'étranglement empêchant une évacuation
fluide des marchandises.
Le
train :un formidable outil pour la conquête
des marchés voisins
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Construit entre 1922 et 1934, le
Chemin de fer Congo-Océan
(CFCO)
se présente comme l'épine dorsale
de l'économie congolaise. Il draine l'essentiel
de l'import/export du Congo en dehors du pétrole.
Le CFCO relie le Port maritime de Pointe-Noire
à Brazzaville (512 km), avec entre les
deux extrémités les villes secondaires
de Dolisie et Nkayi. C'est un chemin de fer à
voie unique, avec une bretelle de 285 km de la
gare de Mont-Bélo près de Dolisie
jusqu'à Mbinda à la frontière
sud du Gabon.
Ces dernières années, l'activité
ferroviaire a diminué, du fait de nombreux
arrêts de trafics consécutifs aux
conflits politico-militaires et à l'état
de délabrement de la voie. Malgré
cette situation,l'Amiral
Pierre Ngombe, directeur général
du CFCO,
reste positif : " Depuis le retour au calme
dans le pays, nous avons réalisé
une montée en puissance, pour atteindre
à ce jour un trafic de l'ordre de 2.200
à 2.500 tonnes par jour dans le sens Pointe
Noire/Brazzaville et un trafic semblable dans
le sens inverse. " déclare t-il. Le
trafic a donc reprit, mais il n'est pas encore
suffisant pour rendre sa réelle vitalité
au secteur des transports.
Des travaux de réhabilitation de la voie
et du matériel ferroviaire son prévus
au cours de cette année 2002. Cet investissement
se fera en partie sur fonds propres à hauteur
de 3 milliards de F.cfa, pour le reste, le CFCO
est à la recherche de crédits ou
de financements étrangers. Tout comme le
port, le chemin de fer a obtenu une relative autonomie
par rapport à l'Etat, suite à la
dislocation de l'ATC. La privatisation n'est cependant
pas imminente. " Je pense que l'Etat doit
avoir le courage de ramener l'infrastructure à
un bon niveau d'exploitation ferroviaire avant
d'envisager la privatisation. " affirme l'Amiral
Pierre Ngombe. Une façon de rendre la mariée
plus belle pour les candidats qui se manifestent
déjà.
Le développement du secteur des transports
est donc fortement tributaire de celui du chemin
de fer. La réhabilitation en cours permettra,
à terme, de faire profiter toute l'économie
congolaise d'un formidable ballon d'oxygène,
dans la mesure où le train offrira au commerce
et aux investisseurs de fabuleuses perspectives
vers les marchés voisins.
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A la
reconquête des marchés perdus |
A Brazzaville, le relais du chemin de fer est pris
par les transports fluviaux en direction des villes
situées au nord, le long du fleuve Congo
et de ses principaux affluents. Cette voie de communication
fluviale dessert Kinshasa (RDC) et Bangui (RCA).
Il y a quelques années, l'ATC gérait
aussi le trafic fluvial. Ce secteur a été
libéralisé à son tour et
laissé à l'initiative privée.
Le challenge consiste à mettre à
flots des navires capables d'assurer efficacement
le transport entre le Congo et la République
Centrafricaine (RCA). Pendant longtemps, le trafic
international de la RCA a transité par
le Port de Pointe-Noire via Brazzaville. Mais
suite aux contre-performances du CFCO et des transports
fluviaux congolais, ce trafic à destination
de Bangui a été détourné
de Brazzaville, au profit des ports de Matadi
(RDC) et de Douala au Cameroun. Un circuit peu
sûr (faute de mieux) qui n'arrange aucunement
les opérateurs économiques centrafricains.
Les autorités congolaises entendent reconquérir
ce marché. C'est là le rôle
du CONSEIL CONGOLAIS des CHARGEURS
, dont la tâche consiste, entre autres,
à uvrer à la fluidification
du commerce entre le Congo et ses partenaires
étrangers. " Il s'agit de créer
des conditions de drainage de trafic sur la chaîne
des transports congolais. " explique Roland
Méza-Kangatima, directeur général
du CONSEIL CONGOLAIS des CHARGEURS.
La réhabilitation des transports fluviaux
congolais à travers une prise en main réelle
par de grands groupes privés devrait permettre
aux opérateurs économiques centrafricains
de retrouver le chemin du Port de Pointe-Noire
via Brazzaville et le fleuve Congo-Oubangui.
La RDC étant défavorisée
par la situation géographique de son port
maritime de Matadi, le secteur des transports
congolais voudrait en profiter pour faire de Brazzaville
une base arrière commerciale, qui permettent
aux opérateurs économiques d'alimenter
la ville de Kinshasa (environ 10 millions d'habitants)
et ses environs. En 2001, plus de 90.000 tonnes
de marchandises ont transité par le Port
de Pointe-Noire, à destination de Kinshasa
(RDC) via Brazzaville. Afin d'accroître
ce tonnage, Roland Meza-Kangatima explique que
le CONSEIL CONGOLAIS des CHARGEURS est en train
de développer, en partenariat avec la direction
du Port fluvial de Brazzaville, la Congolaise
de Manutention et d'Acconage (COMAC). " Cette
structure aura pour vocation d'assainir la manutention
au niveau de la plate-forme portuaire de Brazzaville
et sera ouverte aux opérateurs privés
au plan de la gestion et du financement. ",
affirme t-il.
Une
autoroute entre Brazzaville et Pointe-Noire
! |
Le réseau routier est le maillon faible du
secteur des transports au Congo. Il compte environ
17.000 km de routes intérieures, dont à
peine 10% sont bitumées. La restauration
des routes est actuellement un objectif prioritaire
du gouvernement. C'est ainsi que la route reliant
la ville de Pointe-Noire à la frontière
du Cabinda (environ 30 km) a été entièrement
rénovée. Les marchandises débarquées
au port de Pointe-Noire à destination du
Cabinda (Angola) sont maintenant très facilement
acheminées. Par ailleurs, le gouvernement
a récemment entrepris la construction d'une
route bitumée qui devrait relier le centre
Nord du Congo à l'Est du Gabon en direction
de Franceville. Cette route devrait rejoindre le
Port de Lékéti sur le fleuve.
D'autre part, grâce à l'action des
exploitants forestiers, des routes intérieures
ont été récemment ouvertes
dans les forêts. Elles permettent de relier
les régions entre elles, et d'établir
des connexions entre le Sud-Ouest du Congo et le
Sud du Gabon, ainsi qu'entre la région de
la Sangha (Nord-Ouest du Congo) et le sud du Cameroun.
Ces routes ne sont cependant pas bitumées
et servent essentiellement à l'évacuation
des grumes de bois.
Mais le grand challenge du gouvernement congolais
dans ce domaine, reste la construction d'une autoroute
entre Pointe-Noire et Brazzaville (510 km). La réalisation
de cette voie devrait bien sûr faciliter les
échanges entre les deux cités, mais
aussi ceux avec les villes intermédiaires
de Dolisie, Nkayi, etc. Enfin, il s'agit aussi d'une
manière de contourner les éventuelles
difficultés d'écoulement des marchandises
par train.
Enfin, toujours dans l'optique de retrouver sa vocation
de transit, le Congo suggère à son
voisin, la RDC, la construction conjointe d'un pont
route-rail sur le fleuve Congo, afin d'acheminer
plus facilement les marchandises de Pointe-Noire
à Kinshasa et vice-versa.
Des
opportunités à saisir dans le
domaine aérien
|
Le secteur du transport aérien est caractérisé
par l'arrivée des compagnies privées.
Jusqu'au début des années 90, seule
une compagnie nationale, LINA-CONGO, avait le monopole
du trafic domestique. C'est en raison des difficultés
financières de cette société
et de son incapacité à répondre
à la demande nationale, que le gouvernement
a ouvert l'espace aérien congolais aux compagnies
privées. Elles sont maintenant une demi-dizaine
à se partager le marché. Les plus
importantes sont TRANS
AIR CONGO (TAC) et AEROSERVICE. D'ici fin 2003,
le gouvernement compte cependant rechercher des
partenaires pour faire renaître de ses cendres
l'ancienne compagnie nationale.
Le Ministre des Transports, Isidore
M'Vouba ,
est relativement confiant à ce sujet : "
Nous pourrons re-dynamiser le trafic sous-régional
et celui de la zone d'exploitation unique, qui revenait
avant à AIR AFRIQUE (en faillite). Tous les
Etats de l'ex AIR AFRIQUE sont des destinations
potentielles. (
) Il faut donc que nous nous
dotions d'instruments nationaux pour gérer
ce trafic inter Etats ", affirme t-il.
Aujourd'hui, le trafic relie essentiellement Pointe-Noire
à Brazzaville, tirant ainsi profit des défaillances
du chemin de fer entre les deux villes. En dehors
de ces destinations, il existe 22 aérodromes
secondaires, dont la plupart n'ont que des pistes
en terre et un équipement aéronautique
rudimentaire.
Brazzaville et Pointe-Noire sont les deux seuls
aéroports ouverts au trafic international
et homologués par les organismes habilités.
Ces deux villes sont desservies par des compagnies
internationales telles Air France et Air Gabon.
Les capacités techniques minimales d'accueil
des gros avions sont remplies. Cependant, il reste
un gros effort à faire dans l'amélioration
des conditions d'accueil des passagers. Un troisième
aéroport de classe internationale est en
cours de construction. Situé à Ollombo,
à environ 400 km au Nord de Brazzaville,
ce projet ambitieux fait néanmoins l'objet
de sévères critiques.
Le système des transports du Congo-Brazzaville
est donc principalement fondé sur l'alliance
entre le port de Pointe-Noire, le rail et le fleuve.
Cette chaîne de communication, interrompue
dans les années 90, est maintenant renouée
et retrouve peu à peu sa synergie. La libéralisation
du secteur et son ouverture progressive aux capitaux
étrangers, offrent de vastes perspectives
à ce pays de transit. |