Le secteur financier :outil
de la relance
Classé par les Nations Unies parmi
les pays non fréquentables en 1997, le
Congo a entrepris de manière spectaculaire
la reconstruction de son économie, principalement
via une politique de privatisation intense. Au
terme de la restructuration de son système
financier, le pays a renoué ses relations
avec la communauté financière internationale.
Il est maintenant, depuis plus de deux ans déjà,
classé parmi les pays dits " normaux
". En témoigne le retour d'institutions
internationales telles la Banque Mondiale et le
FMI, qui apportent leur soutien au pays et participent
à rendre confiance aux investisseurs. Mathias
Dzon, le Ministre de l'Economie, des Finances
et du Budget
se réjouit de ce retour : " (
)
nous avons vécu une dizaine d'années
tumultueuses, et nous n'avons pas pu revoir les
principaux paramètres notamment au niveau
de la dette, qu'elle soit bilatérale ou
multilatérale. Cela nous permettrait de
voir l'avenir avec une plus grande sérénité
et de poursuivre nos efforts. " explique-t-il.
Vers
de meilleures garanties financières |
A côté des programmes d'aides des
institutions financières internationales,
la Banque des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC)
offre son soutien à la réorganisation
du système bancaire congolais, notamment
à travers des projets à caractère
sous-régional. C'est le cas avec le projet
de mise en place de la Bourse des Valeurs Mobilières
d'Afrique Centrale (BVMAC). " Il faut instaurer
un marché financier dans la sous-région
(
) nous avons besoin d'avoir une bourse
de valeurs, car c'est déjà là
une réponse intéressante aux opérateurs
économiques en quête de ressources
pour financer leurs activités. C'est aussi
une opportunité pour ceux qui veulent placer
et faire fructifier leur argent. ", explique
Pacifique Issoibeka, directeur de la BEAC
au Congo.
D'autre part, la BEAC aide les banques commerciales
à travers le refinancement des crédits
qu'elles accordent à leurs clients.

L'efficacité du système bancaire
congolais est par ailleurs garantie par la Commission
Bancaire d'Afrique Centrale (COBAC), le gendarme
des banquiers. La COBAC établit des critères
stricts pour la création et l'installation
d'une banque au Congo et dans la sous-région.
C'est elle qui octroie les agréments indispensables,
observe l'accroissement et détecte les
faiblesses des banques, à travers des missions
de contrôle. Grâce à cette
action de la COBAC, les investisseurs devraient
être rassurés sur l'efficacité
des banques nouvellement installées. Ces
banques se sont implantées dans le cadre
de la politique de privatisation des institutions
financières congolaises. Il s'agit pour
l'instant de la COFIPA, déjà présente
dans une demi-douzaine de pays Africains, et qui
a récupéré les actifs de
l'ancienne UCB, de la BGFI, la première
banque gabonaise et enfin du CREDIT LYONNAIS qui
a repris la BIDC. La CAIC reste encore à
privatiser, la Société Générale
et la BNP se sont manifestés pour la reprise.
Tous ces nouveaux acquéreurs expérimentés
et financièrement solides, sont en mesure
de rendre confiance en un système bancaire
ruiné et décrédibilisé
par plusieurs années d'une politique étatique.
" Il y a encore une méfiance du public
envers le secteur bancaire, mais je pense que
notre venue et celle d'autres établissements
devraient concourir à ce qu'il y ait cette
crédibilisation d'une part et un sentiment
de sécurité chez les déposants.
A partir de là, le secteur devrait arriver
à satisfaire un certain nombre de besoins.
" explique Lucien
Elsensohn, directeur général
du CREDIT LYONNAIS CONGO.
Possibilités
de crédits |
Pour davantage d'efficacité, le paysage financier
congolais devrait encore être complété.
" (
) On s'est rendus compte que le système
n'était pas complet, qu'il manquait des établissements
spécialisés. Nous n'avons pas de banque
de l'habitat, pas d'établissement de crédit
financier et pas de banque agricole, or cela correspond
à un besoin réel. Tous ces établissements
sont complémentaires. ", explique Pacifique
Issoibeka de la BAEC.
|
Le crédit reste peu développé,
même si les banques qui se sont récemment
installées sont déjà en mesure
d'en accorder. " actuellement, le secteur
bancaire s'est doté de ressources nécessaires
pour pouvoir accorder des prêts. Faut-il
encore avoir en face de soi des dossiers bancables.
Ce qui veut dire qu'il faut que nous ayons des
interlocuteurs qui ont une comptabilité
fiable. Or il y en a peu. Il est évident
qu'en ce moment le client s'interdit lui-même
l'accès au crédit. Quelle est la
possibilité de monter un dossier si vous
n'êtes pas capable de dresser un bilan et
d'établir des prévisionnels qui
attestent des capacités à rembourser
le crédit sollicité ? C'est le problème
que rencontrent les PME actuellement. ",
remarque Lucien Elsensohn,
directeur général du CREDIT LYONNAIS
CONGO.
Si la base de l'activité bancaire est bien
présente, beaucoup reste encore à
mettre en place, notamment au niveau des systèmes
de paiement qui restent à optimiser. La
grande majorité des Congolais ne disposent
pas encore de cartes de crédit et l'informel
est encore très important. Le secteur bancaire
ne draine actuellement que 20 à 30% du
flux financier. Les banquiers sont cependant optimistes
sur l'avenir de leur secteur au Congo. "
Je pense qu'il y a beaucoup de potentiel puisque
le secteur n'existait plus, tout est à
refaire, et il faut redonner confiance au public
dans l'institution bancaire. Tout cela dépend
de deux facteurs principaux, le premier étant
la paix, et le deuxième la volonté
des autorités de vraiment privatiser tout
le secteur et de le soutenir en lui permettant
un développement continu. Nous sommes en
bonne voie, et si la paix est maintenue, l'économie
va pouvoir se développer et le secteur
bancaire aura les moyens de participer au développement
et à la croissance. ", affirme Tran
Van Thanh, directeur général
de la COFIPA au Congo.
Assurance
: il y a encore de la place ! |
L'autre volet du secteur financier concerne les
assurances. Ce marché n'a été
libéralisé qu'en 1995, ce qui signifie
que jusqu'à cette date, il n'y avait qu'une
seule société d'assurances, l'ARC.
L'installation d'un courtier était donc
impossible. Aujourd'hui, il n'existe dans le pays
que deux sociétés d'assurances,
l'ARC et les AGC. La plus importante, l'ARC est
une société d'Etat en voie de privatisation.
Nathalie Thystère
Tchicaya, directrice de GRAS SAVOYE CONGO,
le premier courtier du Congo, prétend qu'une
troisième compagnie d'assurances est nécessaire
pour avoir une rétention de souscription
beaucoup plus importante. " Il faudrait un
grand nom comme AGS ou AXA, pour ressembler aux
autres marchés africains de l'assurance
et pour que les investisseurs s'y reconnaissent.
" affirme-t-elle.
Au cours des 20 dernières années,
le secteur de l'assurance au Congo a perdu beaucoup
de sa substance au profit de placements à
l'étranger. La Conférence Interafricaine
des Marchés d'Assurances (CIMA), une institution
chargée essentiellement d'harmoniser les
marchés africains des assurances, essaie
de rapatrier les risques sur le marché
local. Le code CIMA a ainsi institué une
directive interdisant tout placement à
l'étranger. Cependant, il existe des risques
industriels extrêmement importants avec
des sociétés comme la CORAF
(raffinerie de pétrole) et la SARIS (plantation
et raffinage de sucre), où les capacités
de souscriptions des sociétés locales
d'assurances ne sont pas suffisantes. Dans ces
différents cas, des montages sont permis
et donnent la possibilité de retenir 25
% sur le marché local.
La relance du secteur financier donne beaucoup
d'espoir pour le développement des assurances.
Depuis la libéralisation, plusieurs courtiers
privés se sont installés. C'est
le cas de GRAS SAVOYE, le troisième courtier
mondial, mais aussi de CCDE et H de B Assurances.
Plusieurs créneaux restent à promouvoir
dans le secteur des assurances. L'assurance vie
n'a jamais été développée,
notamment à cause de l'insuffisance du
tissu bancaire. Il n'y a pas non plus d'assurances
retraites ou même incendies. Le secteur
a donc un immense potentiel de développement.
" L'assurance, c'est le premier réflexe
de l'entrepreneur soucieux de préserver
son patrimoine. C'est donc un secteur d'avenir
car le Congo est en train de se restructurer,
ses marchés se développent et s'assainissent,
les compagnies d'assurances et les courtiers vont
donc évoluer dans le même sens. "
affirme Nathalie Thystere Tchicaya qui remarque
par ailleurs que le chiffre d'affaires de GRAS
SAVOYE Congo a augmenté de 40% entre 2000
et 2001.
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